Afin de clarifier ce qui est du domaine de l'information et du domaine des idées, nous avons pris la décision de préfixer les éditoriaux et articles d'opinion de ce bandeau. Si nous adoptons ce format, c'est que nous recevons de plus en plus fréquemment des remarques sur la prétendue neutralité que devraient avoir nos articles, de lecteurs ne lisant sans doute pas souvent la presse écrite. Nous sommes farouchement opposés à la tendance à l'édulcoration et au politiquement correct qui frappe le sport électronique mais aussi la société au sens large, et nous le resterons. Vous intervenez dans le sport électronique, ou êtes simple observateur mais pensez avoir une opinion constructive qui puisse faire bouger les lignes de l'esport ? N'hésitez pas à nous envoyer votre tribune à [email protected] en précisant votre nom et fonction.


 


 

Des p'tits sous, des p'tits sous,

Qui veut des p'tits sous ?

Des p'tits sous, des p'tits sous,

On veut des p'tits sous, Allez !

 

 

Préambule

 

Il y a peu, on pouvait se poser des questions, on pouvait spéculer ; on en parlait en tout cas. En farfouillant bien on trouve encore de vieux billets démodés qui s’inquiètent un peu de la tournure que prend l'eSport. Comme ce sont de vieilles diatribes, on y lit des préoccupations de vieux : place du joueur, évolution de l'eSport, contrats, éthiques des équipes … Que des questionnements de croulants dépassés.

 

Déjà à l'époque ça percutait moyennement, certains n'étaient pas d'accord, certains n'avaient pas envie d'entendre, pour d'autres encore ça passait tellement au dessus de leur tête que ça en décrochait les nuages. Ces derniers sanctionnaient alors l'article par un « on s'en fout », « sale jaloux » ou « ça n'a rien à faire ici ».

 

Quel confortable rêveur veut redescendre sur terre ?

 

Désormais on évalue beaucoup mieux la trajectoire que prend notre cher sport électronique. Ça brille, ça flash, ça paie ... Tout autant que ça pue.

 

Le titre de cet article explicite assez le point de vue qui sera développé, n’hésitez donc pas à passer votre chemin. Ici on ne dit pas que l'eSport est pourri, on traite de l'« eSport pourri » comme on parlerait du « foot business ». Si cela vous chagrine vraiment, vous pouvez vous rassurer en imaginant quelque vieux moustachus chargeant les moulins à vent sur une carne exsangue. L'influence de ce genre de billets est quasi nulle, prenez les donc pour ce qu'ils sont : un grand coup d’épée dans l'eau. Considérez qu'il faut bien que quelqu'un s'y colle et que cette corvée nous échoit.

 

Laissons donc les vieux radoter, plus personne ne les écoute de toute façon.

 

Eclypsia, c'est pourri

 

On connaissait le financement par le porno, les achats de fans sur Facebook, les 60 000€ de budget mensuel, l'organisation de tournoi à 1000€ où Ocelote n'a pas le droit de stream, les équipes qui vont et viennent, les contrats où tu dois stream H24, la révolution de l'eSport, le professionnalisme que diable ! On connaissait toutes ces petites histoires qui avaient déjà hissé Eclypsia au firmament des dramas les plus croustillants.

 

On s'étonnait, pauvre benêts, que leur TV marche du tonnerre. En effet leurs programmes, y compris les plus médiocres, dépassaient sans peine les statistiques déjà impressionnantes de la TV Millenium. Et on découvre aujourd'hui grâce à ce blog qu'Eclypsia incruste ses TV sur des sites tiers à forte fréquentation pour augmenter virtuellement ses audiences.

 

Si on avait encore quelques doutes sur les méthodes peu orthodoxes de cette équipe, ils se sont désormais envolés. Eclypsia ne reculera devant rien pour devenir une pompe à fric. Il n'y a pas de passion de l'eSport chez ses dirigeants, il sont arrivés vite et repartiront avec le pactole. S'il faut marcher sur le sport électronique au passage ça ne leur posera aucun problème car leur projet n'est qu'un hold up.

 

On entend déjà les gros malins qui assurent que tout est bon pour atteindre la sacro-sainte rentabilité, qu'après tout ce sera une bonne chose si plus d'argent arrive dans l'eSport, que ça lui permettra de se développer. On voit même Eclypsia se fendre d'un article avec des chiffres bidons et des graphiques moisis pour nous expliquer, pauvres demeurés que nous sommes, qu'ils font de la « croissance externe » en se payant des encarts de publicité.

 

Connerie.

 

L'eSport souffre en France d'un énorme déficit d'image auprès des annonceurs et des éventuels sponsors. Certains branquignols ont déjà grillé l'eSport auprès de grandes marques qui ne veulent plus y mettre les pieds. On se rappellera de Peugeot à qui on survendait la fréquentation de l'ESWC et qu'on est pas près de revoir sponsoriser un évènement, où de cette marque de casque très connue qui a complètement revue sa stratégie de sponsoring quand le dirigeant d'une équipe CS est partie avec la caisse. 

 

Les statistiques d'une TV font parti intégrante des dossiers qu'envoient les équipes pour espérer décrocher un support financier, et mon petit doigt me dit qu'on ne tardera pas à retrouver ces statistiques délirantes dans le document qu'envoie Elcypsia aux éventuels sponsors. Imaginez la déconvenue d'un annonceur qui se sera fait enfler par les statistiques d'Eclypsia, évaluez l'envie qu'il aura de se pencher à l'avenir sur notre microcosme, et soyez certains que tous les autres acteurs seront mis dans le même panier. Vous vous étonniez du mode de financement de Chips & Noi pour leur évènement ? Comment un sponsor ne peut il pas s’intéresser à un projet aussi sexy ? Il va falloir vous y habituer si d'autres "pieds nickelés" continuent à arriver avec ce genre d'idées.

 

On ne peut pas tout faire sous prétexte de développer l'eSport, et quand on l'aime un tant soit peu on ne l'associe par à un site comme « lesdebiles.com » sauf à considérer que tous ces glands qui font de la compétition sur des jeux vidéo sont également des débiles. Quelle sera la prochaine étape dans la course à la médiocrité ? Acheter de l'espace publicitaire sur YouPorn parce que c'est le même cœur de cible ?

 

Si ces agissements continuent, tous les acteurs sérieux du milieu vont en souffrir. A court terme parce que leur rémunération va baisser, une publicité moins ciblée est moins rentable, surtout si elle est trop diffusée dans le vent comme le fait Eclypsia. A long terme parce que plus aucun sponsor ne voudra associer son image à un milieu rempli d’esbroufe. L'équilibre fragile qu'avaient trouvé les joueurs et les équipes en se rémunérant sur leur stream peut s'écrouler, et on ne parle même pas de l'image qu'a déjà l'eSport français à l'étranger.

 

Des illuminés qui ont fait mal à l'eSport, on en a connu des tonnes. Mais le potentiel de nuisance d'Eclypsia pour la scène française, c'est vraiment du jamais vu. Espérons seulement qu'il n'est pas encore insoupçonné ..