Longtemps méconnu, voire diabolisé, l’esport se fait enfin connaître du grand public. Malheureusement, cela apporte aussi quelques contreparties…
Cette année fut la révélation au grand public du monde de l’esport : tous les grands médias ont écrit sur le sujet, tourné des documentaires, dépeint des portraits de joueurs pro, etc. Même le gouvernement a mis l’accent sur la reconnaissance de cette discipline fédérant des millions de passionnés à travers le monde. Si on trouvera toujours quelques réfractaires défendant le « c’était mieux avant », la majorité de la communauté est ravie d’avoir enfin une réelle visibilité aux yeux du grand public.
Cette mise en avant a bien sûr du bon : cela attise les sponsors et autres mécènes, diversifie les supports de médiatisation (notamment la télévision) et augmente donc le nombre de spectateurs. Le cercle vertueux semble ainsi être lancé.
Mais, car il y a souvent le revers de la médaille, cette médiatisation soudaine attire également les opportunistes, que ce soit des entreprises ou des particuliers. C’est ici le cas avec cette histoire qui court depuis quelques jours à propos de Secret Story 10 et d’une star mondiale présumée de l’esport, dénommée Darko « Dreamz » Bozovic. Cette nouvelle a fait rire la communauté esport tout entière, car c’est un parfait inconnu pour le plus grand nombre, même pour certains des plus assidus lecteurs d’actualités de sport électronique.
Qui est « Dreamz » ?
Après enquête et révélations (merci aux lecteurs pour les liens croustillants !), on apprend que Darko est un ancien joueur de World of Warcraft en 3V3 de bon niveau (participation aux régionales de la Blizzcon 2011 et 2012) mais n’ayant rien gagné.
Il intègre Millenium en février 2014, alors présent en LCS via un contrat de « sponsoring » avec les ex-Alternate, en tant que manager sur League of Legends, et à la demande des joueurs de l’équipe qu’il côtoyait à cette époque (cela faisait d’ailleurs déjà beaucoup débat chez les lecteurs de Millenium, voir l’image ci-dessous). Un Split et demi plus tard, l’osmose n’est plus la même avec les joueurs, et ces derniers demandent à Bjoran de reprendre la main en direct sur le projet.
Après ça ? Mystère. TF1 le présente comme serveur dans une boite de nuit alors que lui se décrit mannequin et acteur. YouTuber invétéré, il aime se mettre en scène dans ses vidéos, le plus souvent topless, la plus vue étant celle où il explique comment il a perdu du poids en peu de temps grâce à sa volonté.

Source : site Millenium.com
Pourquoi lui ?
Alors oui, TF1 fait du TF1. Quand on regarde Secret Story, on sait à quoi s’attendre : des secrets plus ou moins aguicheurs qui sont en réalité surfaits, voire un peu bidon. Et en ces temps de buzz mania, quoi de plus racoleur que l’esport ?
Mais une question revient sans cesse : pourquoi Darko ? Un joueur inconnu, éphémère manager d’équipe, YouTuber avec très peu d’abonnés et de fans, et qui a visiblement plus envie d’être mannequin sous-vêtement (cf. son CV sur son book Internet) que d’améliorer l’image de l’esport.
Est-ce son CV, légèrement protéiné pour la partie esport, présenté lors du casting de TF1, qui lui aurait ouvert les portes de Secret Story ? Ou grâce à d’anciens contacts du milieu esport, approchés par TF1 en recherche de ce type de profil pour l’émission ? A moins peut-être que ce ne soit sa prestation dans une des parodies de l’émission d’Arthur « La grande soirée des parodies TV », diffusée en août 2015, où il apparaît nu façon rugbyman (le ballon bien placé évidemment) dans le clip « Travelo » de Florent Peyre ? La question reste ouverte.
Une chose est sûre, le mot « esport » a franchi un nouveau cap en passant dans un Prime Time de TF1. Reste à savoir si ce genre d’initiative améliore la visibilité de l’esport et en augmente par conséquent son importance. Ou à l’inverse, si cela décrédibilise le travail de centaines de personnes travaillant dans les structures esport depuis plusieurs années...
Modifié le 17/04/2019 à 15:01
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PS : hymn of legend est la chanson de toute une génération de star esport ne vous moquez pas. Merci
Modifié le 17/04/2019 à 15:01
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Je voudrais juste réagir là-dessus, parce que je pense que c'est assez bête et caricatural.
Dans le fond, quand tout le monde parle de "faire avancer l'esport", qu'est-ce que ça signifie ?
D'un point de vue joueur / spectateur, voici ce qu'on pourrait souhaiter:
- Un grand pool de joueurs professionnels afin d'élever le niveau de jeu global et d'avoir des plus belles parties.
- Un grand respect des joueurs au sein de l'infrastructure générale afin de les mettre en confiance et de leur permettre de se consacrer dans les meilleures conditions possibles à leur jeu.
- Un système de protection des joueurs afin d'éviter leur exploitation et de leur permettre de retomber sur leurs pieds en cas de fin de carrière (qu'elle soit courte ou longue, ou que ce soit même juste une tentative de se lancer)
- Des tournois intéressants, du bon show, des bons shoutcasters
- Un aspect communautaire fort afin que la communauté (et donc les joueurs et les fans) ait une importance prépondérante dans les grandes décisions esportives
Alors bien sûr, il faut de l'argent pour accomplir tout ça, et on peut être heureux d'attirer les sponsors et le grand public. Toutefois, la "professionnalisation" s’accompagne de l'enrichissements d'entreprises privées, plus ou moins recommandables, mais qui TOUTES, font passer leur bonne santé financière comme étant la même chose que le progrès et le développement de l'esport.
Or, les intérêts des entreprises esportives (structures, web TV et autres) et les intérêts des joueurs / fans ne sont pas identiques. Et il peut y avoir de grandes différences de priorités entre les deux.
Evidemment, on voit toujours les Bjergsen et autres stars quand on parle des joueurs pros. Ces joueurs là n'ont globalement pas à s'en faire. Mais à côté, il y a combien de joueurs qui ont les dents, qui arrêtent leurs études et qui tentent de vivre de l'esport, et se font ensuite exploiter par des structures, à jouer 14h / jour dans une pièce sans fenêtre et à dormir à 5 dans une chambre, en étant payé une misère ? Combien se retrouvent sans rien après une carrière infructueuse ? Combien ont rompu avec leurs familles pour tenter l'aventure esport ? Le documentaire Road to Worlds explique bien ça : https://youtu.be/Q8AnjrGRmAQ?t=8m . Et ici, c'est un joueur qui a réussi. Mais il y a eu combien de tragédies pour un conte de fée ?
Aujourd'hui, les structures pro sont relativement opaques. Et font l'esport selon combien ça va leur rapporter. Bien sûr, il y a parfois une sanction des fans / viewers puisque ce sont eux qui rapportent de l'argent au final. Mais globalement, je ne trouve pas que l'esport se développe de manière contrôlée, et je n'ai absolument pas une confiance aveugle dans la plupart des structures de l'esport (à part, évidemment Team-aAa).
Mais répéter "Plus d'argent, plus de visibilité pour le bien de l'esport", c'est reprendre les arguments des structures pour notre cause (fans / viewers / joueurs), alors que ce ne sont pas nos intérêts directs. C'est une bêtise. On devrait être plus lucide par rapport à tout ça, et avoir nos propres objectifs / mots d'ordre.
Modifié le 17/04/2019 à 15:01
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