La rédaction a rencontré Renaud "WiPR" Malfait lors de l'Occitanie esport à Montpellier, le casteur Valorant de chez 1pv et ex-analyste de Vitality sur Counter-strike. Le temps pour nous de revenir sur le duel CS / Valorant et d'en savoir davantage sur son personnage.

*aAa* CBZ : Salut Renaud, comment vis-tu l’événement ici à Montpellier ? Es tu content de cette Occitanie Esport ?

Renaud "WiPR" Malfait : Tout va très très bien, pas de soucis là-dessus. Je suis content d’être ici à Montpellier, on clôture l’année compétitive de Valorant France donc ça fait plaisir de rencontrer toute l’équipe en physique, les fans et bien sûr les équipes qu’on ne voit en général que sur internet. Je suis content, les choses se passent bien pour l’instant. C’est fluide. Donc oui, tout va bien.

Revenons un peu en arrière, tu as été joueur sur CS, analyste, casteur, aujourd’hui quelle est ta relation avec Counter-Strike ? Suis-tu toujours l’actualité ?

Il est vrai que j’ai complètement arrêté de jouer à CS, on sait tous que c’est un jeu qui demande beaucoup d’investissement, pour se maintenir à bon niveau avec une bonne compréhension du jeu. Quand j’ai fait le switch vers Valorant je l’ai fait à 100 %. Mon rapport avec CS aujourd’hui c’est que j’y joue très occasionnellement avec des potes et que je regarde quelques compétitions avec notamment les matchs de Vitality, HEET, LDLC, Gen One… Pour jeter un petit coup d’œil sur quelques équipes françaises. Mais rien de plus.

As-tu regardé le major de Rio ? Qu’en as-tu pensé ?

Je l’ai regardé un tout petit peu, car c’est vrai que j’avais pas mal de cast sur le même créneau. C’était un peu difficile de suivre au vu de l’intensité et vu comme ça dure longtemps. J’ai jeté quelques petits coups d’œil, j’ai suivi Vitality et j’ai aussi regardé quelques matchs de FURIA histoire de profiter un peu de l’ambiance sur place. J’ai aussi suivi la grande finale, c’est vrai que le fait qu’il n’y ait pas d’équipe brésilienne rendait le moment moins exceptionnel. Il y avait vraiment quelque chose d’intéressant pendant les matchs de FURIA, c’était très impressionnant. C’était du jamais vu dans l’histoire de l’esport. C’est vrai que j’ai l’habitude de suivre les teams françaises, mais voir FURIA sur ce major là avec ce public… C’était quelque chose.


WiPR a tout fait sur CS:GO (c) ESL

Cela fait déjà quelques années que tu as fait le switch, peux-tu rapidement revenir sur ce qui t’avait encouragé à quitter CS, et peux-tu nous dire si aujourd’hui tu referais le même choix ?

C’est une question de période, si cela devait arriver dans les mêmes conditions, je referais exactement le même choix aujourd’hui. Dans le sens où pour moi, Valorant est sorti dans un timing quasi parfait, je sortais d’un an avec Vitality et je suis arrivé à saturation. À la fin je n’en pouvais plus, j’étais à la limite du burn-out, j’avais fait beaucoup d’analyse, beaucoup de voyages etc… En fait, Valorant est arrivé 3 ou 4 mois après mon départ de chez Vitality, c’était le timing parfait, le jeu était rafraîchissant et complètement nouveau tout en gardant une base "FPS tactique" que je connaissais et que j’appréciais. Donc voilà, Valorant est arrivé au timing parfait pour ma carrière dans l’esport car c’est ce que j’adore faire. Sans avoir cet aspect "dégoût", j’ai trop touché à CS, avoir la tête dans CS pendant plus d’un an, c’est ce qui m’a poussé à faire le switch, et c’est ce qui fait que je me sens très bien aujourd’hui sur Valorant. Je n’ai pas de regrets.

J’ai vu qu’Apex t’adressait quelques piques humoristiques sur twitter à pas mal de reprises, peux-tu m’en dire plus sur ta relation actuelle avec tes anciens joueurs et Vitality ? Te contentes-tu d’être leur supporter ?

C’est assez sporadique me concernant, je regarde leurs matchs au moins d’un œil, ça c’est certain. J’ai des contacts très distants avec les joueurs et le staff, mais il m’arrive de discuter avec MaT et Mathieu Peche avec qui je m’entends bien. Sur twitter, avec les banter, les gens ont l’impression qu’il y a du conflit dans l’air, mais pas du tout, je m’entends super bien avec Dan, et on s’est quittés en très bons termes. Il n’y a pas d’arrières pensé, seulement une bonne entente et de bons souvenirs.

Je me permets de faire le raccourci : d’après ce que tu me dis, tu ne ferais pas le choix de devenir analyste sur Valorant également, de peur que le rôle te dégoûte du jeu ?

En fait, ce qui m’a dégoûté est d’avoir trop eu la tête dans le jeu. Manger et dormir CS jusqu’à ne plus pouvoir le faire. L’année chez Vitality m’a permis de comprendre que je peux tenir un rôle d’analyste, mais ce n’est pas quelque chose que j’apprécie, c’est beaucoup de travail dans l’ombre pour des résultats qui sont très difficiles à apercevoir. Ce sont des heures et des heures de préparation et des fois en plein match tu te poses la question "la préparation a-t-elle servi à quelque chose ?", c’est un peu dur à vivre. C’est vrai que je me suis rendu compte à la fin de mon année chez Vitality que ce rôle ne me permet pas de m’épanouir, ça ne me plaît pas spécialement, c’est ce qui fait que je n’ai pas reproduit l’expérience sur Valorant malgré des propositions que j’ai reçu pour le rôle de coach et analyste. Mais je préfère les décliner, car je sais que cela va me rattraper à un moment ou à un autre et je vais perdre le plaisir que j’ai dans le jeu. C’est quelque chose que je veux absolument éviter.

Le rôle de commentateur est donc taillé pour toi ? Te vois-tu aller vers l’international à l’image d’un Maniac sur CS:GO ?

J’aime le commentary, la vulgarisation du jeu pour les spectateurs, etc… C’est un rôle qui demande beaucoup de travail, mais qui est beaucoup moins frustrant à accomplir que celui d’analyste. Concernant l’évolution vers l’international, il faudrait déjà que mon niveau d’anglais s’améliore (rires)… Je ne suis pas assez carré comme Maniac pour être capable d’intervenir sur des desks internationaux. Après, je vois les choses différemment dans le sens où je touche un public français depuis toujours. Avant de travailler pour Vitality, je faisais des vidéos et lives CS en français, ma communauté a toujours été francophone, c’est vrai qu’aujourd’hui je ne me vois pas passer à l’international "juste pour passer à l’international". Mon futur est en France et c’est pour ça que je vais m’y tenir.

J’ai envie de revenir sur le débat des communautés, fondamentalement, ta position fait que tu es une des personnes les plus capables d’en parler : quelle comparaison fais-tu entre CS et Valorant d’un point de vue purement esportif ?

En fait, les différences entre les deux jeux ne font que s’agrandir à chaque update. Puisque plus Valorant avance, plus il se démarque de ce qui constituait sa base initiale qui était très proche de Counter-strike. Les ajouts de contenu, les nouveaux agents, etc. À chaque fois, tout cela rajoute une dimension complètement neuve au jeu et son univers. C’est ce qui fait que plus le temps passe, plus les jeux sont vraiment très différents, après il est certain que des choses sont communes, le 5v5, l’amorçage de bombe, les rôles. Encore qu’en ce qui concerne les rôles, là où tout le monde peut tout faire en théorie sur CS, sur Valorant le rôle t’est attribué dès le début de la partie jusqu’à la fin de celle-ci. Grâce au choix de l’agent qui est plus ou moins adapté, tu peux avoir plus de flexibilité tactique, car plus de possibilités de par la différence des agents, mais tu es aussi plus limité par rapport à celle-ci, individuellement parlant. Comme je l’ai dit, cela devient de plus en plus difficile de comparer les deux jeux, je trouve que les jeux sont très distincts maintenant.

Donc tu en déduis que les deux jeux peuvent cohabiter à la manière d’un duo DotA/LoL, sans cannibalisation ?

Comme à chaque fois qu’un épisode de CS est paru ou qu’un autre FPS à vocation compétitive s’est lancé, le public a voulu absolument dire qui est le meilleur, et que jeu restera en vie. Pour moi c’est clair que les deux jeux sont maintenant destinés à des publics différents et que tous les joueurs y trouvent leur compte. Donc oui, pas de doutes, les deux entités cohabiteront très très bien. Je vais même aller plus loin en affirmant qu’ils se poussent l’un et l’autre vers le haut. Les jeux s’inspirent les uns les autres, et c’est une très bonne chose pour les joueurs et l’écosystème.


Le cast valorant d’1pv en 2021 avec MiPR (c) Twitter @Emma_BLP

Merci de me tendre la perche, tu connais déjà assez bien Valve pour pouvoir en discuter. Es-tu d’accord pour dire qu’il y a eu un avant et après sur CS depuis la sortie de Valorant ? Les développeurs de Seattle ont-ils gagné en efficacité depuis ce jour ?

Il y a des efforts, c’est le jour et la nuit je trouve. C’est assez marrant de voir des choses comme l’AWP qui est passé à cinq balles comme par hasard, l’opérateur sniper de Valorant a cinq balles dans son chargeur depuis le début. C’était une piste d’équilibrage pour cette arme en quelques sortes et Valve l’a bien compris grâce à Riot. Quand tu joues régulièrement et que tu connais les deux jeux, tu te rends compte des petits points qui deviennent des similitudes. En soi, c’est normal, cela veut dire que la compétition entre les deux jeux est saine. Ils n’ont juste pas du tout la même manière de procéder, Valve laisse beaucoup de place à la communauté dans son évolution tandis que Riot est beaucoup plus dans le contrôle des choses, ce sont juste des philosophies différentes qui mêlent des inspirations réciproques.

Merci Renaud pour tes réponses, je vais terminer avec une question bonus : penses-tu qu’un jour tu pourrais revenir sur CS ? Cela pourrait-il te venir à l’idée notamment quand tu vois un major qui se profile en France ?

Là tout de suite, c’est une chose que je n’envisage vraiment pas. La place que j’ai aujourd’hui sur Valorant nécessite du "full time", je dois être à fond dans le jeu pour y maintenir un bon niveau et une bonne compréhension du jeu. Je suis un peu partout sur Valorant, je fais des vidéos, je stream, je cast, c’est un vrai travail et je ne me vois pas faire cela sur CS et Valorant, car ce serait faire la moitié des choses. J’ai fait le switch, je m’y tiens, je suis à fond sur Valorant. Il ne faut jamais dire jamais, mais voilà pour le moment c’est inenvisageable. Le major, j’espère pouvoir aller y faire un tour. L’année 2023 va être super chargée en termes de cast mais je vais le suivre de toute évidence, après, cela se fera en tant que simple spectateur. Dans la logique de ma relation actuelle avec Counter-strike et comme depuis deux ans : pour le kiff, pour suivre les potos et c’est tout.