Embarquez dans la machine à remonter le temps, accrochez votre ceinture et prenez garde à la fermeture des portes. Fermez les yeux, inspirez profondément et préparez-vous au décollage. Vous voilà désormais en 1988, année de sortie de la Megadrive. Les souvenirs remontent déjà et je vois vos yeux pétiller de nostalgie. Il est donc temps de revenir sur les traces d'une console qui aura marqué toute une génération de joueurs. Pourquoi elle et pas une autre ? La réponse dans la suite de cet article.

 

 

Comprendre le marché

 

Avant d'aller plus loin, quelques anecdotes. Initialement, la Megadrive devait s'appeller "MK-1601". Grâce à un élan de bon sens, le développeur décida de changer le nom de la console en celui que l'on connaît aujourd'hui. Si le Japon, L'Europe, l'Asie et l'Australie comptaient dans les rayons de leurs boutiques spécialisées des SEGA Megadrive, les États-Unis avaient à faire à un autre nom de code, la SEGA Genesis. En effet, le nom Megadrive était déjà une marque déposée aux USA. Dernière chose, SEGA, avant que sa machine ne sorte, marquait fortement sa présence dans les salles d'arcades via de nombreuses bornes, dont quelques une expérimentant déjà le System16.

 

La Megadrive première du nom

 

Tout d'abord, il faut savoir que la Megadrive est la machine que SEGA a le mieux vendu. Même si elle n'a pas remporté la guerre qu'elle menait avec la Super Nintendo, elle est parvenue à s'écouler à un peu moins de 30 millions d'exemplaires en 10 ans. La Saturn et la Dreamcast ne seront jamais aussi bien accueillis que la Megadrive ne l'a été, ce qui lui confère une place toute particulière dans le coeur de son père comme dans ceux de ses fans.

 

Détail qui a son importance : Nintendo contrôlait en 1988 92% du marché japonnais et 95% du marché nord-américain des consoles de jeux vidéo. Autant dire que contester la domination de la NES n'était pas chose facile, pourtant Sega a pris le risque de se frotter une nouvelle fois à la concurrence. Cette fois, il coupe l'herbe sous le pied de Nintendo et sors avant lui la première console 16 bits au monde. La PC-Engine d'octobre 1987 est devenue une 16 bits seulement quelques années plus tard. En toute logique, la Megadrive, plus puissante et à la bibliothèque vidéoludique plus importante dépasse rapidement la PC-Engine en terme de ventes. La Nintendo Entertainment System est quant à elle à la fin de sa très belle vie et s'apprête à laisser sa place à la SNES. 

 

 

Le succès de la Megadrive n'a pas été le même partout. Le Japon, où la console sort le 29 octobre 1988, n'est pas tellement enthousiaste lors de son arrivée. Ce n'est toutefois pas le cas de notre vieux continent où la Master System avait déjà trouvé terre d'accueil. De plus, il faut garder à l'esprit que Nintendo, à l'époque, se moquait pas mal de sa côte de popularité en Europe. Paradoxalement, ce n'est seulement que 2 ans plus tard que la Megadrive verra le jour chez nous. Pour s'imposer d'une manière plus considérable dans le monde entier, SEGA n'hésite pas à investir dans la publicité, affichant des slogans attaquant directement son rival (voir image ci-dessus).

 

SEGA does what Nintendon't

 

Ce n'est pas une publicité mensongère. Loin de là, quand l'on sait que SEGA propose aux consommateurs une machine jusque là inédite au public. On reste sur le traditionnel support cartouche, mais l'on affiche clairement la puissance de la machine, jusqu'à marquer en gros "16-BIT" sur celle-ci. De plus, la Megadrive s'affiche comme une console faite pour avoir les titres de bornes arcade dans son salon, de quoi donner envie à n'importe quel gamer acharné de s'offrir la petite boîte noire.

 

Le pad : une croix directionnelle et 3 boutons A, B et C

 

Au début des années 1990, Nintendo était accusé de ne pas proposer assez de contenu mature aux consommateurs (et oui, déjà à cette époque). SEGA profite de cette faiblesse pour s'imposer comme le constructeur des adultes, proposant ainsi divers titres destinés à satisfaire ces derniers. En outre, la manette de la console est plus élaborée que celles que l'on avait connu jusqu'à présent. Plus esthétique et au nombre de touche plus important que le pad de la NES, la manette Genesis séduit. Encore faudrait-il avoir des jeux auxquels jouer pour pouvoir en profiter. Pas d'inquiétudes, des perles, il y'en a sur la machine de SEGA.

 

Parmi celles-ci, nous pouvons nommer l'excellent Space Harrier II (ci-contre), shoot them up disponible lors du lancement de la Megadrive au Japon. On retiendra aussi le cultissime Mortal Kombat dont la version Genesis n'était pas censurée contrairement à celle sur SNES. Il vous suffisait effectivement d'activer un code spécial pour pouvoir accéder aux "fatality" version gore, indémodables encore aujourd'hui. Dans le registre des jeux demandant une incroyable adresse, existait aussi Alien Soldier (vidéo). Si le scénario se révélait totalement plat, le cheminement des niveaux s'avérait beaucoup plus compliqué et constituait un véritable challenge comme on les appréciait à l'époque.

 

 

 

En 1990, SEGA prend conscience qu'il lui manque un élément important au sein de son catalogue de jeux. Une mascotte, une vraie, capable de tenir tête au célèbre plombier moustachu de Big N. Parce que Alex Kidd, ça ne le faisait pas trop pour un constructeur qui ciblait un public dit adulte. C'est alors que Naoto Ōshima, une des personnes qui s'arrachait à trouver un personnage emblématique pour la firme, soumis l'idée d'un hérisson bleu ultra-rapide du nom de "Mr. Needlemouse". C'est ainsi que naquit Sonic, qui en plus d'avoir une frimousse charismatique, pouvait mettre en valeur les caractéristiques techniques de la Megadrive, notamment sa rapidité de calcul et les graphismes qu'elle était en mesure d'afficher.

 

  

 

On ne vas pas refaire l'historique de ce premier opus car celui-ci est disponible dans un autre article disponible sur ce lien. Néanmoins, il est bon de rappeler que Sonic The Hedgehog a connu un succès mérité, qui a su atteindre les espérances de son créateur. Mais c'est surtout sa suite, sortie un an plus tard qui aura marqué le plus les esprits. En effet, Sonic The Hedgehog 2 est le jeu le plus vendu de la Megadrive : plus de 6 millions d'exemplaires se sont écoulés ! Il est considéré comme un "killer game", un titre qui a lui seul vous donne envie d'acheter une console, un peu à la manière d'un Super Mario Bros sur NES.

 

 

 

 

Enfin SEGA avait trouvé de quoi rivaliser, enfin SEGA avait commencé à prendre un essor considérable sur le marché des jeux vidéo. Dès lors, les ventes de la machine commencent à grimper, et face à la sortie de la Super Nintendo, le constructeur décide de mettre les bouchées double. Malheureusement, si l'envie de tenir tête à la société niponne se fait ressentir, le virage amorcé dès 1992 est quelque peu mal négocié par la firme américano-japonaise. 

 

Un succès modéré

 

Malgré des ventes plus faibles comparées aux autres consoles sur le marché, la PC Engine existe toujours. SEGA est décidé a enterrer une bonne fois pour toute celle-ci, et par la même occasion donner un gain de puissance à la Megadrive, histoire de montrer à la SNES, sortie entre temps le 21 novembre 1990, que c'est elle qui en le plus dans le ventre. C'est ainsi que le Mega-CD voit le jour en 1991, extension permettant de recevoir le support CD-ROM utilisé alors par la PC Engine. Si les ventes sont honorables, environ 6 millions d'unités, le Mega-CD peine à s'imposer comme le nouvel accessoire à la mode. La sortie du Mega-CD2 qui avait des coûts de production moins importants que la première version n'aidera pas à doper les ventes du gadget.

 

Le Mega-CD, un semi-échec pour SEGA

 

En effet, les éditeurs de jeux vidéo ont du mal à tirer pleinement partie de ce nouveau format. Le public n'est pas totalement convaincu et beaucoup décident de se tourner vers la Super Nintendo. En 1992, sort la Megadrive II. Non pas une suite comme le sera bien plus tard la PlayStation 2 pour la PS One, mais une version relookée de l'originale. Cette console est moins chère que la précédente, le port pour les casques audio et le réglage du son ayant été supprimés. La durée de vie de la console se rallonge, mais déjà l'on sent la fin d'une époque. 

 

La Megadrive II, version "light"

 

Le véritable glas sonne en 1994. La cinquième génération commence à voir le jour avec l'arrivée de la Saturn. C'est alors que SEGA prend le risque de sortir la 32X, une autre extension de la Genesis qui lui apporte la 3D. Mais tout comme le Mega-CD, les titres ne puisent pas suffisamement les ressources de l'accessoire 32-bit. Les développeurs mais aussi les joueurs boudent celui-ci, et de ce point commence la fin de carrière de la Megadrive. Seulement 30 jeux, dont beaucoup se sont avérés médiocres, ont vu le jour sur ce support.

 

Une troisième version de la Genesis sortira en 1997, sous l'effigie de la société Majesco, qui avait obtenu une licence pour bâtir la machine (image ci-dessous). Vendue a 2,5 millions d'unités, la production de celle-ci est arrêtée lorsque les cartouches de jeux se sont retrouvées en rupture de stock. Autre erreur de la part de SEGA, avoir sortit seulement en 1996 la Nomad, une Megadrive portable. Si le groupe avait eu cette idée quelques années auparavant, nul doute que cet enième modèle de la console aurait fait tabac. En effet, elle vous permettait de jouer à n'importe quel jeux de la Genesis et pouvait même se brancher à une télévision et accueillir par la même occasion une deuxième manette. 

 

 

En voulant devancer trop rapidement la concurrence, SEGA n'a pas su prendre le temps de réfléchir à ce qui aurait pu lui permettre de remporter la bataille entre la Megadrive et la Super Nintendo. Si l'on attribue le succès de cette dernière au génie de Big N, on peut aussi pointer les nombreuses erreurs qu'a pu commettre SEGA. Vouloir trop de puissance (32X) et de nouveaux supports de jeux (Mega-CD) en faisaient notamment partie. Pourtant, on reprochait souvent à la Genesis d'avoir une palette de couleur moins importante que celle de la SNES. Or, ce défaut majeur n'a jamais été corrigé par SEGA. Enfin, la GameBoy était déjà trop bien installée sur le marché pour que la Nomad ou même la Game Gear ne puissent lui tenir tête.

 

La Genesis reste malgré ces faux pas une réussite commerciale, la meilleure de la firme pour ainsi dire. Son catalogue de jeux, même si ces derniers ne sont pas tous inoubliables, est particulièrement vaste, avec plus de 800 titres disponibles. La console sera émulée sur plusieurs plate-formes, du PC à la PlayStation 2 en passant par la Nintendo DS et la PSP. La Megadrive a vécu 10 longues années de 1988 à 1998 et s'est vendue a 29 millions d'exemplaires, contre 49 millions pour la Super Nintendo.