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Kivvi est passé à notre micro à la Coupe de France.

 Crédits : François Kaiser

 

Au sortir de quelques mois chez Team Vitality durant lesquels il aura permis à l'équipe de remonter en Rainbow Six Pro League notamment, Julien "Kivvi" Serier, coach de référence en France est parti officié au sein de l'équipe allemande T3H eSports.

 

Lors de la Coupe de France, nous nous sommes entretenus avec Kivvi sur son passage au sein de la Ruche, son job en tant que coach et son parcours actuel à l'international avec T3H.

 

team-aAa.com : Pour entamer cet entretien, je vais te demander un retour sur ton parcours chez Vitality et l'expérience que tu en tires pour ton rôle de coach.

Julien "Kivvi" Serier : L'expérience chez Vitality a vraiment été enrichissante, d'un point de vue personnel d'abord parce que c'était la première fois que j'intégrais une si grosse organisation, donc découvrir ce que ça implique d'être dans une grosse organisation en termes de visibilité, de représentativité, de poids aussi, parce qu'on n'a pas la même pression lorsqu'on est très peu suivis ou alors quand on est très suivis. Ça a donc été une découverte personnelle extrêmement enrichissante de pouvoir travailler aussi avec des acteurs majeurs de l'esport comme Neo, ce genre de gens avec qui on n'a pas forcément l'habitude de travailler, de discuter. Là, c'était un vrai contexte professionnel, c'était très enrichissant d'un point de vue personnel. D'un point de vue d'équipe, j'arrivais dans un contexte qui était assez compliqué, je suis arrivé, une semaine plus tard l'équipe descendait en Challenger League, je n'avais quasiment pas eu l'occasion de travailler donc on partait d'une situation de crise, faut le dire, où il fallait remettre l'équipe sur les rails pour repartir dans le bon chemin. Je pense que cela a été réussi, au moins remettre l'équipe en ordre de bataille, de travail, c'est ce qui nous a permis de remonter en Pro League. Après, je pense qu'on a, et c'est le grand regret de mon passage chez Vitality, pas réussi à trouver le cinq qui marchait bien, qui arrivait bien à s'entendre, qui avait la même philosophie de jeu, ça a été notamment pour ça qu'on a cherché à remplacer Hansen, mais même en l'ayant remplacé, c'était pas encore ça, ce qui a provoqué le départ de risze derrière à la suite du Six, et je pense qu'à la suite de ce Six j'étais encore très motivé, j'avais encore des idées pour faire évoluer les choses, on avait tenté de mettre Voy en lead in game avec un soutien de Panix et puis ça marchait bien, ça bridait trop Panix donc on a encore cherché à changer, on a plus porté risze vers le lead d'une partie et on n'a pas réussi à trouver la bonne formule, ce qui fait que l'équipe s'est un petit peu fracturée à la suite du Six, on n'a pas réussi à faire le résultat qu'on attendait même si on est tombés dans un groupe extrêmement compliqué, on n'a pas réussi à faire le résultat minimum qu'on attendait, ça a crée une petite fracture et c'est ce qui a crée le départ.

 

Cette fracture a-t-elle précipité ton départ, ou aurais-tu pu rester avec les joueurs ? Voulais-tu changer d'air ?

Elle a précipité le départ parce que les joueurs voulaient du renouveau, et donc du renouveau sans moi, et au final je pense que c'était une bonne solution et pour eux et pour moi de partir. Ce que j'en retire en tant que coach, c'est de l'expérience vis-à-vis de la gestion des joueurs, chercher à bien les comprendre, chercher peut-être même plus qu'à les comprendre, on discutait bien mais je me suis rendu compte après coup qu'il y avait des envies, des besoins ou des fonctions des joueurs que je n'avais peut-être pas assez bien cernées pour les mettre dans les meilleures conditions. Moi ça m'a fait vraiment prendre de l'expérience et progresser en tant que coach, ça m'a fait évoluer donc au final c'est positif.

 

 

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Kivvi, en bas à droite de la photo de famille - Crédits : Kitomy

 

 

Tu as parlé de Neo, il y avait également Lyloun à tes côtés chez Vitality. Comment travaillez-vous tous les deux, il y avait-il une sorte de complémentarité, travaillez-vous un peu chacun dans votre coin avant de mettre en commun par la suite ?

Une des premières choses que j'ai fait en arrivant chez Vitality, c'est de me mettre sur Team Speak avec Lyloun et de préparer un plan d'action, sur quoi bosser, quoi faire, répartir les tâches et comment communiquer. Elle travaillait sur la partie analyse, donc elle analysait nos adversaires, moi je travaillais sur la partie jeu d'équipe/stratégie. Elle me remontait des éléments sur les adversaires ou qu'elle avait vu dans notre jeu pour qu'on puisse ensuite les travailler avec l'équipe.

 

À ton départ de Vitality, dans quel état d'esprit étais-tu, cherchais-tu à faire une pause, trouver un nouveau projet ?

Je voulais complètement partir sur un autre projet. Mon projet personnel global est d'arriver à vivre de l'esport et d'en faire mon métier à long terme donc ma motivation était claire, je ne ressentais pas le besoin d'une pause, c'était clairement l'objectif de retrouver une équipe de qualité avec laquelle travailler et me projeter vers l'avenir le plus rapidement possible et ça a pris un petit peu de temps [rires].

 

La volonté de le faire à l'international chez T3H était-elle naturelle ou au contraire un choix par défaut ?

Ça a été une proposition, j'étais en contact avec quelques équipes françaises et c'est au final une équipe européenne qui est venue me chercher et qui m'a tout de suite fait une proposition très intéressante. J'ai vu les joueurs, j'ai vu les joueurs, je me suis dit que c'est l'occasion de prendre une expérience à l'international, ça ne peut qu'être bénéfique et j'y suis allé, j'ai sauté sur l'occasion.

 

Peu de temps après, vous participiez à la DreamHack Austin. Vous deviez passer au travers du BYOC et vous avez presque un sans faute.

On tombe contre Disrupt au deuxième tour, on les joue sur Coastline et on les perd 5-3 sur un match qui était à notre portée, on a fait de grosses erreurs, ce sont des choses qui arrivent, on l'a regretté un petit peu mais c'est au final la seule map qu'on perdra puisqu'on déroulera le Loser's Bracket assez facilement.

 

Quant à l'expérience personnelle, tu coach une équipe composée de joueurs européens, il y a trois allemands, un hongrois et un finlandais. Comment cela se passe-t-il en interne, n'est-ce pas compliqué de travailler avec eux, ne ressens-tu pas la barrière de la langue ?

Je pense qu'on a la chance de tous parler assez correctement anglais, même si mon anglais était un petit peu rouillé au début, ça revient au fur et à mesure, ça revient très vite et finalement non, la langue n'est pas une barrière et la communication se fait très bien. Je pense aussi qu'elle se fait très bien parce que les joueurs ont dans l'optique de créer une vraie équipe. Une des premières choses qu'on m'a dit quand je suis arrivé, c'est qu'ils voulaient avoir une équipe soudée avec des personnes qui s'entendent bien, c'était très important qu'on arrive à créer une ambiance de groupe et j'étais évidemment très favorable à cela parce que je pense que c'est extrêmement important, ça s'est fait très rapidement.

 

 

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Kivvi derrière ses joueurs à la DreamHack Austin

 

 

Quant au nouveau format, apporte-t-il une vision différente au coaching, à l'analyse ?

Il y a deux éléments qui ont fait évoluer le travail, bien sûr les bans. Les bans, je suis absolument ravi et excité de leur apparition, étant attendus depuis un moment, parce qu'on peut enfin développer de nouvelles choses, les bans permettent de développer de nouvelles choses et de travailler autrement parce qu'on va parfois forcer des bans contre l'adversaire, parfois pour une carte spécifique ou pour deux BPs spécifiques, et ça permet d'imaginer le jeu autrement. Le jeu ne se passe pas pareil quand on n'a pas de Mira, le jeu ne se passe pas pareil quand on n'a pas de Thatcher, quand on n'a pas de Thermite, ou d'Hibana, donc chaque confrontation va être différente puisqu'on peut décider de ban différemment et ça ouvre un panel de décision stratégique pour le coach et son équipe, qui rend le travail de coach encore plus intéressant. Le deuxième volet qui fait bouger les choses, c'est la rotation de BPs, qui passe sur deux rotations au lieu d'une quand on a gagné un BP, ça force à aller chercher des troisièmes BPs qui sont pas forcément simples, je pense notamment à Oregon où les 2-3èmes BPs sont assez mauvais et ça pousse à l'originalité, ça pousse à se creuser les méninges pour trouver des set-ups intéressants et moi c'est ce qui me motive dans mon rôle de coach, je suis quelqu'un qui aime beaucoup me creuser la tête et je prends donc énormément de plaisir à le faire.

 

Comme tu as pu le dire, ces apports ont-ils donc en quelque sorte l'objectif d'oeuvrer dans le but de contraindre le jeu adverse, de l'enrayer et non pas se concentre sur l'aspect purement stratégique ?

Ça apporte une stratégie de contre, clairement, j'ai vu Vitality jouer, on était sur Consulat et je n'ai pas compris pourquoi on n'a pas ban le Glaz de ZephiR. Glaz, c'est un opérateur fort sur Consulat et on a en plus un des meilleurs Glaz d'Europe dans l'équipe d'en face. Typiquement, là, on utilise le ban pour contrer.

 

L'entretien touche à sa fin, je te remercie du temps accordé et te laisse le mot de la fin.

Je suis déjà ravi d'être à cette belle Coupe de France, ravie de garder le contact, puisque le fait que je sois maintenant à l'inter pourrait limiter mon contact avec les équipes françaises, donc ravi d'être ici et j'espère que tout le monde passe un bel événement, vivement la DreamHack Valencia pour me confronter un petit peu à toutes les équipes que je suis en train de voir ici.