Nous avons échangé avec Valentin "risze" Liradelfo à l'occasion de son arrivée chez Vitality. Il revient en détail, avec franchise et sans langue de bois sur la fin du projet Rogue et sur son retour au sein de l'écurie à l'abeille.

*aAa* : Vous avez terminé champions d'Europe à l'issue de la dernière saison de Pro League, mais nous avons récemment appris la restructuration de Rogue avec le départ de Hicks et le tiens. Comment en est-on arrivé là, de ton point de vue ?
risze : C'est en réalité un process qui était en cours depuis la fin du Six Invitational. Les résultats y ont été plus que désastreux, un énième échec, notre première place en Pro League européenne, je vais te le dire honnêtement, je pense qu'on n'y accorde pas beaucoup de valeur, du moins c'est mon cas car c'est du online et on sait qu'on est capables d'aller loin en ligne. On a fait un très bon début de saison, toute notre préparation y était consacrée, mais la seconde partie de saison a été un petit peu plus tumultueuse parce qu'on est resté sur nos acquis étant donné le processus dans lequel on était engagé.

On avait déjà nos prochains changements à l'esprit - qui auraient normalement dus se faire après le Six, mais Rogue n'a pas souhaité que l'on fasse de changement parce qu'il y avait un conflit entre deux groupes de joueurs : d'un côté moi qui proposais un projet avec Hicks, AceeZ et deux joueurs, de l'autre Korey et AceeZ qui ne voulaient pas de changement à l'origine, mais voulaient eux-aussi trouver deux nouveaux joueurs. A partir de là, la situation était assez compliquée, mais on a quand même joué à fond notre deuxième moitié de saison parce qu'on est des professionnels et que l'on sait faire fi des aspirations différentes de chacun. Je pense que si l'on est arrivés premiers, c'est également du fait que la scène européenne était dans sa globalité en restructuration avec la nouvelle superteam de G2 qui galérait un peu au début, à l'image de Na'Vi.

In fine, ça s'est passé sur un très long processus de cinq mois, je suis extrêmement soulagé d'en être sorti. Ce n'est pas l'outcome que j'espérais pour être tout à fait honnête, mais je remercie Vitality de m'avoir offert une porte de sortie qui... Je suis extrêmement surpris au jour le jour du line-up avec lequel je suis, il y a beaucoup de boulot, mais l'environnement est très agréable et c'est vraiment quelque chose comme cela que je souhaitais. Un des joueurs que je souhaitais recruter chez Rogue, c'était Fabian donc ça correspond tout de même à mes attentes, en plus de cela l'organisation a - une nouvelle fois - été très accueillante.

Le Six Invitational a-t-il été la goutte qui a fait déborder le vase, le point de non retour ?
Quand on a changé Alphama, on voulait le remplacer par BriD. Les négociations n'ont pas abouti - aussi étant nous en train de changer d'organisation, changer un joueur en plus d'arriver chez Rogue était compliqué à envisager avant le Six. On a eu énormément de choses à se soucier en plus du jeu et je remercie énormément Robz d'avoir été là pour nous soutenir à fond, et bien plus que son soutien, pour avoir mené à fond cette barque sans moteur et qui avait bien besoin de ramer. Il a vraiment énormément de mérite dans le projet qu'on avait. C'est vraiment quelqu'un que je respecte énormément, qui a fait énormément pour l'équipe et qui a toujours pris ses décisions en fonction des performances. C'est aussi grâce à lui qu'on est arrivé là où on était.

En voyant que BriD n'était plus disponible, on s'est rabattus sur ripz, un second choix. C'est à la base un ami de Korey, on n'était pas ultra convaincus, même AceeZ, après les trials avec lui : c'était pas fou. A partir de ce moment-là, on savait qu'il y avait un gros travail à faire sur son cas, on a d'abord essayé de le mettre en confiance car c'est une personne qui ne parle pas beaucoup donc il est d'autant plus difficile de communiquer avec lui sur ce dont il a besoin in-game etc. On a vraiment essayé au maximum de le pousser, j'ai été très honnête avec lui en lui disant qu'il était un second choix et qu'il y aurait potentiellement besoin de faire un changement au prochain mercato. D'un côté, c'est vrai que ça met un peu de pression au bonhomme, mais d'un autre je pense aussi que c'était pour lui une occasion rêvée. A sa place, on m'aurait dit ça, je me serais tout simplement donné à 300% afin d'être sûr de ne pas partir au prochain mercato.

Au final, ripz a été une déception lors des matchs compétitifs, non d'un point de vue niveau, mais il est selon-moi un peu perdu in-game. C'est à ce moment-là que la question s'est posée, mais on n'avait pas le temps d'espérer qu'un joueur évolue autant, ce n'était pas notre premier choix pour bon nombre de raisons dont la communication. On joue à un niveau où tout le monde doit participer, mettre sa main à la patte et même si ripz est quelqu'un de très facile à vivre, il n'est pas pro-actif et met à mon sens des bâtons dans les roues à son équipe. On peut donc dire que le process a commencé avant le Six, c'est juste qu'il faut bien faire des choix et c'est ce qui a été fait.


Crédit photo : Ubisoft

Avec du recul sur cette dernière année, quels ont été les plus gros problèmes au sein de l'équipe ? Quel serait le fruit de ton analyse à froid ? Nous avons notamment eu vent, dans des interviews d'Alphama ou de Crapelle, d'un certain problème mental n'ayant pas su être résolu. Qu'en penses-tu ?
Je vais être tout à fait honnête avec toi, je pense qu'il y a certains joueurs qui se plaignaient trop dans le roster. C'est une vérité, on a eu une discussion là-dessus avec tout le monde dans une chambre après notre match contre Team SoloMid (le premier match de l'équipe au Six Invitational, ndlr). J'y ai vraiment demandé d'arrêter de se plaindre parce que les tables étaient trop basses, parce qu'on ne pouvait pas jouer convenablement, parce que ça tremblait, les écrans sont pas biens, les PCs sont pas biens... A un moment, il faut un peu se rendre compte de la chance qu'on a, du talent qu'on peut apporter et du mental que l'on se doit d'avoir. Ça, c'est quelque chose dont certains jeunes joueurs manquent cruellement parce que l'expérience de la vie ne les a pas encore atteints. Ce sont des gens qui ont connu l'esport dans une seule configuration, l'actuelle. Moi, j'ai attendu 10ans avant de pouvoir faire de l'esport professionnel. J'ai travaillé entre-temps. Je n'ai pas encore 30ans et encore beaucoup de choses à apprendre sur la vie, mais je réalise la chance que j'ai de pouvoir faire ce que je fais à l'heure actuelle, notamment grâce aux spectateurs et aux organisations. Quand j'entends des gens se plaindre de la nourriture, de conditions de jeu qui sont plus que raisonnables, c'est sûr que ça ne fait pas toujours plaisir quand ça arrive.

Par ailleurs, tu as mentionné Alphama, je pense qu'il avait un gros problème de gestion de stress en LAN, c'est un fait. Il suffit de regarder comment il se comportait lors du match contre Aerowolf (aux finales de la Pro League Saison 11, ndlr). Attention, on a tous nos torts, j'ai les miens, AceeZ a les siens, on a perdu ce match en équipe, je ne suis pas en train de remettre la faute sur Alphama, qui a fait un très très gros travail sur lui-même, qui s'est beaucoup amélioré sur pleins d'aspects et je l'en remercie d'ailleurs car c'est quelqu'un qui a toujours su écouter et se pousser dans ses derniers retranchements pour évoluer. Pour le coup, s'il y a bien un joueur professionnel dans cette équipe, c'était bien lui avec Hicks. En l'occurence, on sentait qu'Alphama avait vraiment de gros problèmes de gestion de stress, pendant le match, il était toujours la tête dans les mains. Les LANs, c'est compliqué, il faut beaucoup de mental. Je le rejoins quand il dit dans son twitlonger qu'il y avait des problèmes de mental. Maintenant, comme nous, il était part du problème et c'est pour cela qu'on l'a changé. C'est également pour cela que je voulais Fabian, un IGL qui sort un petit peu les gens de leur cocon quand ça ne va pas, qui permette à Hicks de se concentrer un petit peu plus sur le jeu parce que c'était compliqué pour lui de lead dans une équipe qui ne tenait pas en place comme la nôtre.

Et Crapelle, c'est effectivement une grande partie de son travail de gérer les gens, leur façon de se comporter par rapport à l'équipe et aux conditions dans lesquelles ils étaient, les faire relativiser, faire tout un travail de fond sur les gens. Crapelle a un petit peu démissionné du rôle de coach après la période LeStream. C'est bien beau de dire qu'il y a des problèmes de mental, mais il faut aussi se rendre compte qu'on est parfois part du problème. Pour le coup, Robz a compensé énormément le travail de coach de Crapelle et c'est difficile pour moi d'entendre et de lire de Laurent qu'il y avait des problèmes mentaux évidents, il fallait les régler.

“Pour ce qui est d'Alphama, c'est tout simplement un choix d'avenir. Je pense que c'est un joueur qui deviendra excellent s'il reçoit le bon héritage de "nous", les joueurs d'expérience.” Tes mots à Interro en fin d'interview de Pro League, après le recrutement d'Alphama, ton ancien coéquipier révélé au plus haut niveau à vos côtés, qui a explosé aux Etats-Unis chez eUnited. Un mot pour ton ancien protégé ?
Je pense qu'Alphama a subi de mauvaises remarques et parfois même du harcèlement dans l'équipe, pas de ma part, je pense avoir été un capitaine dur envers lui parce que je voulais vraiment qu'il s'améliore et qu'il évolue, mais j'ai également été un peu son grand frère, je l'aimais bien et je l'aime toujours bien, c'est quelqu'un avec qui j'entretiens de très bonnes relations, j'apprécie le garçon et j'ai vraiment beaucoup de respect pour lui. Il a subi de mauvaises remarques dans notre roster, je tiens à le rappeler.

Chez eUnited, il arrive dans un groupe qui lui fait confiance car c'est un joueur qui vient d'Europe, qui a de l'expérience, qui a tapé des LANs, qui a gagné des matchs et des LANs nationales. C'est quelqu'un qui a été accueilli à bras ouverts dans un groupe qui lui donne les clés. Je pense qu'Alphama, lorsqu'il a les clés d'un projet et aime le faire tourner autour de ses idées, évolue et performe très bien quand il fait ça. C'était le cas chez Supremacy, quand il a commencé à lead, il s'est tout de suite émancipé et ça se ressentait dans son jeu. La question est de savoir s'il parviendra à lead un projet comme eUnited avec ce qu'on lui a laissé comme héritage et/ou ce que lui a envie de faire. Je lui souhaite. Je pense qu'Alphama, c'est un peu quelqu'un qui vient de nulle part. Après son kick de Supremacy, il a fait une rapide apparition à la 6Cup 2018 et s'est fait sortir 2-0 avec Reflex (par Supremacy, ndlr). Il avait fait deux frags sur son match, à ce moment-là c'est lui-même qui l'a dit, il pensait sa carrière terminée. Moi, je pense que sa carrière était loin d'être terminée, il est jeune et pouvait toujours trouver un projet dans lequel évoluer et se refaire un nom. En l'occurence, c'est sur et certain que la proposition qu'il a eue de notre part, ce n'est pas quelque chose à quoi il s'attendait [rires]. On venait d'un roster qui avait du mal avec les visions de jeu qui s'entrechoquaient, les gens n'arrivaient pas à suivre le lead de Hicks depuis qu'il avait pris le lead in-game. On avait besoin de jeunes cerveaux pour comprendre vers quel style de jeu on voulait se tourner, quel style de jeu on voulait avoir. C'était parfait de prendre un joueur comme Alphama en plus de starplayers comme UNNO et AceeZ. L'ami Alphama, il vient de loin, il ne faut quand même pas l'oublier. Qu'il continue de s'améliorer et je lui souhaite que cela ce passe aussi bien qu'il le veuille chez eUnited.

Le chemin de Hicks et le tien se séparent après deux ans de camaraderie. Une page qui se tourne...
Je vis très mal ma séparation avec Hicks, je ne vais pas te le cacher. Hicks, avant d'être un ami, c'est aussi le meilleur coéquipier que je n'ai jamais eu sur Siege et c'est probablement ce qui en a fait un ami par la suite. C'est quelqu'un qui m'a tout de suite mis en confiance chez Millenium, qui m'a tout de suite épaulé, enseigné, appris, fait voir le jeu d'une façon que je ne voyais pas avant. C'est dingue de se dire que j'étais aveugle à ce point-là. Avant Millenium, j'étais chez Vitality et j'étais vraiment aveugle, j'avais l'impression de comprendre, mais je ne comprenais pas en réalité ce qu'il se passait. Quand je vois tous les conseils qu'il a donnés à l'ensemble de l'équipe et que j'ai absorbé, Hicks, c'est ce qu'il m'est arrivé de mieux sur Siege. Ne plus l'avoir à mes côtés, c'est effectivement plus qu'une déception, c'est aussi comme tu le dis la fin d'une ère, la fin d'un projet, la fin d'une idée - que je ne pense pas que les Allemands vont récupérer. Je savais très bien que Hicks ne pourrait pas me suivre chez Vitality, mais je me suis toujours dit que je prendrai mes décisions sans copinage, quelque chose de très malsain selon-moi. C'était un pur choix de carrière de partir et ne pas attendre sur le banc avec mon pote, mais c'était dur et pas que pour Hicks, mais également pour Robz parce que ce sont vraiment deux personnes qui étaient le core d'un projet qui me tenait fortement à coeur, d'une idée, d'un fonctionnement qui a montré ses limites, même si on aurait peut-être pu mieux faire. C'est une grosse grosse page qui se tourne, peut-être même un livre qui se ferme.


Crédit photo : Marjorie Poncin

Mais un nouveau pan de ton histoire avec ton retour chez Vitality, deux ans après. Abordes-tu cela comme un nouveau départ dans ta carrière ?
Oui, je pense bien. Déjà parce que les conditions ne sont pas les mêmes, Vitality n'est plus ce qu'elle était en 2017 pour ma part : j'arrive dans des conditions professionnelles, presque personne n'était payé sur Siege à cette période. C'est effectivement une nouvelle aventure et je redécouvre un peu Vitality ici. Inutile de préciser que ce n'est pas la même équipe, je ne retrouve aucun de mes anciens coéquipiers et j'arrive dans un environnement qui est extrêmement différent. Je joue avec deux des joueurs les plus titrés du monde, c'est pour moi l'occasion d'absorber encore plus d'expérience de gens qui sont arrivés là où j'aurais aimé arriver avec Rogue. C'est une toute nouvelle aventure qui commence et j'ai hâte de voir ce qu'elle va donner.

Tu viens de parler d'absorber de l'expérience de tes nouveaux coéquipiers. Chez Rogue, tu jouais le rôle d'ancien, de joueur d'expérience avec de jeunes coéquipiers. Cela va changer chez Vitality ? Quelle sera ta place dans l'équipe ?
Pas vraiment, dans la mesure où je ne suis pas en totale reconversion. Je conserve un profil de joueur expérimenté à côté d'Hungry et de BiBoo. Quand on est arrivés chez V, on a tout de suite compris - à travers les premiers trials avec Fabian - qu'il y avait énormément de lacunes, sur plein de choses et surtout quant à la façon de jouer le jeu, le teamplay pur et dur et la vision de certaines choses comme l'utilisation du stuff, etc. Ces lacunes faisaient stagner le groupe dans le passé, dans une ancienne meta. Nous avons beaucoup discuté stratégie avec Fabian, avant même de nous retrouver chez V et on est en total accord sur la façon dont on doit jouer au jeu à l'heure actuelle. C'est ce dont manquait BiBoo lors de ces derniers mois en tant qu'IGL et je comprends pourquoi : je me serais retrouvé dans la même situation ni je n'avais pas eu Hicks. Quand tu te retrouves dans une situation où tu as du mal à percevoir comment le jeu doit se jouer, vers quoi tu dois mener tes coéquipiers, si tu n'as pas quelqu'un pour t'épauler ou toi-même la bonne vision de jeu que Fabian avait chez G2, je pense que c'est compliqué d'aller de l'avant. BiBoo avait vraiment besoin de ce revirement, c'est pour ça qu'on est arrivés à ce recrutement-là.

Je n'arrive donc pas en tant que nouvel élève de Fabian et Goga, j'en apprends tous les jours d'eux comme j'en apprends tous les jours de BiBoo et Hungry car ce sont des joueurs extrêmement talentueux et très malins, mais je conserve un bagage de vision et de volonté de jouer le jeu d'une certaine manière. J'apporte ma pierre à l'édifice grâce à mes expériences passées, Fabian va apporter tout ce qui est leadership, call, mid/late round, cohésion d'équipe, structure. Goga, c'est un excellent teammate avec qui il est très agréable de jouer. Avec ce groupe-là, on arrive à tous essayer de faire parler notre expérience de la meta actuelle.

Tu évolueras notamment aux côtés de Goga et Fabian, deux légendes de Rainbow Six avec qui tu tenais particulièrement à faire équipe à entendre tes dires sur les réseaux sociaux. Ce projet a-t-il d'autant plus d'aura à tes yeux ?
Je pense surtout que ça aurait été très compliqué de ne pas le faire avec eux pour être tout à fait honnête. Fabian, je vois quel genre de leader il est. Je pense que j'ai besoin de lui pour continuer à step-up - je pense que mon équipe avait besoin de lui pour continuer à step-up. On arrive dans un autre environnement, c'est Vitality et j'ai posé pas mal de questions lors de mes trials pour savoir comment cela se passait chez eux, car je ne comprenais pas qu'avec les joueurs qu'ils avaient, ils aient autant de mal à être efficaces en match. Être bas de tableau avant la composition qu'ils avaient, c'est pour moi compliqué, honnêtement.

Je ne savais pas ce qu'il se passait dans l'équipe, donc j'ai posé des questions en arrivant, j'ai demandé ce qu'il se passait mentalement, au niveau de la façon de voir les choses. Je vais dire un mot fort, mais on a un peu d'expérience en psychologie à force de côtoyer des gens, d'évoluer dans des équipes. On sait dire ce qui est néfaste, ce qui impacte la confiance des joueurs, on s'aperçoit que certaines personnes - pensant le faire - ne jouent pas vraiment pour l'équipe... Tu arrives donc à distinguer et lister les différents problèmes et c'est à ce moment-là que tu cherches à les résoudre : demander à un tel de faire un travail sur lui-même, ce qui est souvent compliqué. Ça arrive que ça marche bien, je pense que BiBoo a fait un énorme travail sur lui-même en l'espace de quelques jours seulement et que vous n'êtes pas prêts pour le BiBoo qui participera à l'European League, je vous le dis tout de suite. Alphama a aussi fait de gros efforts sur sa personne et il y a des joueurs qui n'y arrivent pas, pour eux, ils sont comme ils sont et cela ne changera pas. A ce moment-là, tu ramènes quelqu'un qui a de la poigne, qui a du leadership, qui va apporter une certaine structure, qui va faire en sorte que les gens se dépassent. Si tu n'as pas Fabian - ou quelqu'un comme Fabian - c'est compliqué de le faire. Crois-moi, il n'y a pas deux personnes comme Fabian sur cette planète.

A quel Vitality faut-il nous attendre ? Une continuité de l'ancienne équipe, un Vitality 2.0 similaire à ce qui se faisait chez G2 ? Fabian prend les rennes, sommes-nous prêts au nouveau Vitality ?
J'aimerais bien que cela soit un Vitality à la G2 qui gagne tous les titres [rires]. Plus sérieusement, je pense que l'entité G2 était beaucoup trop forte et que la reproduire n'est pas notre souhait primordial. On souhaite prendre les grandes qualités de G2, de Vitality et de Rogue et faire un mix and match. Je pense que vous allez voir un Vitality 2.0, ça c'est sur et certain, cela ne sera aucunement dans la continuité de l'équipe jusqu'à présent. On y travaille tous, joueurs comme staff, pour y arriver et montrer un autre visage du roster. Je pense qu'avec les joueurs qu'on a à l'heure actuelle, ça va se faire plus rapidement que prévu. Avec Fabian qui prend les rennes, j'aime à penser que personne n'est prêt au nouveau Vitality.

A l'inverse de la NAL, l'EL sera dans un premier temps disputée en ligne. De votre côté, avec des joueurs en provenance de toute l'Europe, prévoyez des sessions de bootcamps plus ou moins permanentes, pour les matchs notamment ?
La situation sanitaire étant ce qu'elle est, c'est compliqué de prévoir des bootcamps dans un futur plus ou moins proche. On était déjà en train d'en discuter il y a quelques jours et la décision a été prise de ne pas en faire pour le moment car trop de contraintes avec des joueurs qui viennent des quatre coins de l'Europe. Il est compliqué de faire venir tout le monde dans de bonnes conditions, d'avoir un bootcamp productif, ce qui passe par des conditions de voyage et de séjour correctes. Pour le mieux, je pense que nous n'en ferons pas à l'heure actuelle. Lors de la reprise, si la situation évolue et le permet, oui, bootcamp il y aura parce que c'est ce que j'ai dit au staff V en arrivant : je suis un amoureux des bootcamps, je pense que ça aide vraiment les équipes à step-up du moment que c'est bien géré et sans exagération.

Lors de précédentes interviews, que ce soit des mots de Crapelle, Robz ou Alphama, j'ai pu entendre que le rythme a pu être très soutenu à certaines périodes et que cela n'a pas joué en la faveur des anciens Giants. Comment ne pas reproduire cela chez Vitality, malgré vos ambitions et votre volonté évidente de soulever le Hammer au Six Invitational ?
Je pense qu'on a un staff qui comprend bien qu'on ne doit pas s'exténuer à la tâche, premièrement. C'est quelque chose que j'ai remarqué en arrivant, l'équipe était très demandeuse de travailler et nous sommes en pleine période de honeymoon, une phase où tout le monde veut bosser. Le staff parvient à nous canaliser et nous imposer des jours off, on y va mollo tout en conservant un rythme soutenu. Je pense qu'on a simplement besoin de faire confiance au staff, qui est là pour avoir un point de vue extérieur sur notre état de forme, comprendre nos besoins en tant que joueur et faire en sorte de nous programmer un agenda en accord avec ces variables. Tu compares un petit peu Rogue et Vitality, pour le coup il n'y a que moi qui vient de Rogue. Ce n'est pas vraiment moi qui prenais les décisions chez Rogue, notamment au niveau des bootcamps, on votait. On les plaçait généralement avant les events, oui on avait un rythme soutenu chez LeStream - parce que c'était extrêmement nécessaire. On avait vraiment faim de régler nos problèmes et on voulait vraiment être prêt, sachant que nous avions en plus du encaisser le remplacement d'UUNO. Je pense aussi que nous nous sommes un peu relâchés chez Giants. On a été un peu trop cools et ce n'est pas fou, je ne le cache pas. C'est pour ça qu'on est arrivés dans une situation où certains avançaient leur burn out, alors qu'on ne travaillait pas tant que ça.


Crédit image : Ubisoft

Alphama a notamment parlé de méthodes de travail atypiques développées chez eUnited. Quid chez V ? Avez vous votre rituel, quelque chose pour vous faire avancer en équipe ?
Il est un peu tôt pour le dire, nous apprenons encore à nous connaître les uns les autres. Même si je connais très bien BiBoo, je n'ai encore jamais joué avec lui en compétition. Il faut vraiment qu'on apprenne à se connaître, trouver la manière dont nous voulons avancer. On n'a pas encore de rituel, je ne sais pas s'il y en aura un à l'avenir mais je comprends l'idée d'Alphama, ça ne m'étonne pas de lui [rires]. Je pense qu'au fil de l'avancée des choses, nous allons comprendre comment un tel est et un tel n'est pas et ce qui sera d'ordre de faire.

Pour bon nombre de personnes, vous êtes un peu la nouvelle DreamTeam du Rainbow Six international. Comment ne pas sombrer dans l'excès de pression et l'envie de trop bien faire ?
Déjà, je pense honnêtement que c'est faux. On a une très bonne équipe sur le papier, mais je suis aussi conscient du boulot qu'il y a à faire pour l'amener où l'on veut, pour rattraper les lacunes et le retard encaissé sur la meta. J'ai souvent été dans des équipes qualifiées de DreamTeam, la dernière fois chez Vitality cela ne s'est pas super bien passé. Ce sont toujours des équipes où je savais que nous avions le talent sur le papier, ce pourquoi j'y étais, pourquoi je me projetais dedans, pourquoi j'en éprouvais de l'intérêt. Mais de là à nous appeler DreamTeam, je pense qu'il faut un peu lever le pied les gars. On ne sait pas comment on va jouer ensemble sur une longue période.On sait qu'on peut bien jouer sur la honeymoon, mais on ne sait pas comment on va évoluer, on ne sait pas comment les gens vont se comporter. On est des joueurs, mais avant-tout des humains avec un certain profil. Cela ne veut pas forcément dire qu'on aura une alchimie, le sujet d'une réflexion profonde à chaque mercato que les gens ne voient pas. Au-delà des stats, on accole les profils, leurs qualités et défauts pour les mettre dans des rôles. On doit tout faire fonctionner, un groupe, cinq joueurs, comme si on n'était qu'une seule personne. C'est vraiment difficile et je pense que les gens sous-estiment énormément cet aspect de la chose.

Tu ne peux pas arriver et parler - sous prétexte qu'il y a cinq gros noms de la scène Siege qui sont là - d'une team de superstars comme G2 a pu le faire. Pour moi, leur nouvelle équipe comprend de gros fraggers, certes, c'est médiatique et je comprends le phénomène, mais je ne vois pas en quoi c'est une équipe de superstars. D'une façon générale, je n'aime pas ce mot-là. Pour moi, les équipes de superstars sont les équipes qui gagnent. G2, c'était une équipe de superstars à l'époque où ils gagnaient tout. Tu ne peux pas arriver et caractériser une équipe de DreamTeam quand elle n'a même pas joué un match. Je pense qu'il faut un peu lever le pied, comprendre qu'on doit faire nos preuves. On le sait et ne nous considérons en aucun cas meilleurs que les autres équipes. On sait très bien qu'on a nos chances et que si on travaille bien, on va gagner. Ce n'est pas un problème et je pense que tout le monde peut le penser. Mais je pense aussi qu'on est conscients du travail à réaliser pour arriver là où on souhaite, on ne se verra pas gagnants avant de l'être, c'est sur et certain.

Je te remercie pour le temps que tu m'as accordé et te laisse le mot de la fin.
Merci à toi pour le temps que toi, tu m'as accordé. Je souhaite évidemment remercier très profondément Hicks et Robz, une nouvelle fois, pour ce qu'ils m'ont apporté, pour m'avoir fait devenir le joueur que je suis à l'heure actuelle. Je leur dois à peu près 90% du succès qu'on a eu ces derniers temps. Je souhaite également remercier Vitality pour le deuxième accueil chaleureux qu'ils m'ont fait, ainsi que leurs supporters qui m'ont bien accueillis. Merci à eux.