La Karmine Corp a infligé un 3-0 net à Fnatic en playoffs du LEC Spring 2025. Dans l’émission EUphoria, Caliste et Reha reviennent sur les clés de ce succès, les progrès depuis le First Stand, et les dynamiques collectives qui structurent l’équipe avant leur revanche face à Movistar KOI.
Une Karmine structurée, une victoire maîtrisée
Cette rencontre nous a un peu laissé sur notre faim. Annoncé comme un duel serré entre deux outsiders du Top 4, le BO entre la Karmine Corp et Fnatic s’est finalement terminé sur un 3-0 sans appel. Pour Reha, entraîneur en chef de KC, cette victoire était le fruit d’un travail méthodique : « On les connaissait par cœur, et eux aussi nous connaissent. Mais cette fois, on a eu l’avantage sur tous les plans : la draft, la botlane, et le contrôle de la carte ».
La préparation avait ciblé un point précis : désactiver la botlane adverse dès les premières minutes. Caliste raconte : « Mon état d’esprit, c’était simple : je voulais gagner la lane à tout prix. On avait des matchups favorables, on savait qu’ils n’auraient pas de réponses claires à notre pression ». La première game, jouée sur Draven, a donné le ton. « Ils ont tenté un dive niveau 2 alors qu’on était sous tour. Ils ont tout claqué, on a survécu, et derrière, la partie était déjà pliée. On les a forcés à swap, à jouer sur notre tempo ».
Fnatic a semblé désarmé. Aucune contestation sur les premiers objectifs, des phases de laning brouillonnes et un jeu de carte inexistant. Reha l’analyse sobrement : « Nous, on joue autour des dragons. Eux, ils veulent snowball par les kills. On a refusé leurs conditions de victoire, et ça s’est vu ». Dans la deuxième game, Caliste et Targamas sortent un Lucian/Nami inattendu. Un choix que le jeune ADC justifie par une préparation pointue : « Je suis allé regarder des VOD de LPL. Elk et JackeyLove, surtout. Leur façon d’agresser avec Lucian/Nami, de gérer les spikes niveau 3 ou 5, c’est différent. Je voulais vraiment l’utiliser de façon proactive ».
Le First Stand comme déclencheur
Le déclic n’est pas venu d’un scrim ou d’un match de LEC, mais du First Stand disputé en mars en Corée du Sud. Une compétition internationale express, à laquelle KC avait été invitée. Le bilan, côté résultats, avait été frustrant. Mais humainement et tactiquement, l’expérience a marqué les esprits. « On avait trois jours de scrims, pas plus, et beaucoup d’obligations médias. Mais le choc, c’était les games. On s’est fait exploser sur l’agression early game. On voulait jouer scaling avec des tanks et des mages, mais ce n’est plus suffisant. Les LPL et les LCK ne jouent pas de cette façon. Ils te sautent dessus, tout simplement », analyse Reha.
Caliste revient plus longuement sur ce tournoi, vécu comme un révélateur. « Jouer contre Viper, contre JackeyLove, c’est une chance. Ce sont les meilleurs. Et franchement, ils étaient meilleurs. Mais je me suis dit : je ne suis pas si loin. Et surtout, j’ai vu que mes erreurs étaient claires, identifiables ». Ce qu’il retient surtout, c’est le changement de paradigme imposé par les meilleures régions : « En Europe, si tu fais une erreur, souvent tu ne te fais pas punir. Là-bas, chaque mauvaise range, chaque mauvais clic est puni. Si tu hésites, t’es mort ».
Reha abonde : « On a réalisé que notre plan de jeu en Winter ne marcherait pas à l’international. Il faut être capables de dominer dès les cinq premières minutes ». Ce constat a déclenché une série de révisions internes, sur les drafts, les priorités de pick, le rôle du jungler. « On a mis du temps à digérer, mais maintenant, on est plus complets ».
Communication, équilibre, responsabilités
Une autre clé de cette montée en puissance réside dans la communication interne, un point longuement évoqué dans l’émission. Pour Reha, la Karmine Corp 2025 n’est pas une équipe avec un shotcaller unique : « Chaque joueur peut prendre la parole. C’est une force, mais aussi un piège. Si on a cinq idées différentes au même moment, ça devient illisible ». Caliste illustre cette tension : « Parfois, j’annonce un move, et dans la même seconde, quelqu’un d’autre call autre chose. Si t’as pas la discipline de te taire ou d’écouter, ça se transforme en cafouillage. C’est ce qui nous a coûté le match contre Heretics ».
L’exigence de discipline est aussi présente dans la botlane. Caliste et Targamas n’hésitent pas à se parler franchement. « Si je grief, il me le dit. Si je trouve qu’il grief, je le lui dis aussi. Mais on ne s’arrête pas là. On revoit les plays ensemble, clic par clic. On discute des cooldowns, de ce qui a marché ou pas. » Cette relation s’est construite dès le début du projet. « Je savais que jouer avec Targamas allait m’élever. Il est exigeant, mais on se comprend bien. On regarde beaucoup de VOD ensemble. Et moi, je me suis inspiré de gens comme Hans Sama ou Exakick. Ce sont des ADC très vocaux, très exigeants ». Reha apprécie cette approche : « Ce que j’aime chez Caliste, c’est qu’il ne fuit jamais ses responsabilités. Il est dur avec lui-même, mais il en attend autant des autres ».
Interrogé sur la gestion du stress, Caliste se livre plus personnellement. « Je suis anxieux dans la vie de tous les jours. Je stresse pour des trucs bêtes. Mais dans la game, je suis calme. J’ai appris à respirer, à me concentrer. Et surtout, à faire confiance ». Le travail avec le staff mental de KC est évoqué, mais aussi l’ambiance interne : « L’équipe m’aide beaucoup. On se chambre, on se soutient. Et je pense qu’on progresse tous ensemble. C’est ce qui fait qu’on peut réagir vite, rebondir ».
Objectif Movistar KOI : le match de la revanche
La Karmine se prépare désormais à affronter MKOI, qui l’avait battu lors du premier tour sur un BO très disputé. L’enjeu est immense : une place en finale, et surtout une qualification pour le MSI. Le ton est donné d’entrée. « On veut prendre notre revanche. Ce jour-là, on n’était pas à notre niveau. Moi le premier, j’ai mal joué », reconnaît Caliste.
Reha est sur la même ligne : « On avait mal draft, mal exécuté. Mais on a appris. Et aujourd’hui, je pense qu’on a des réponses à tout ce qu’ils peuvent proposer ». Les deux insistent sur un point : ne pas tomber dans l’excès de confiance. « Il faut être humble mais vengeur. Ils ne nous donneront rien. Il faudra aller chercher chaque game », affirme Reha. Caliste complète : « Si on joue propre, qu’on a les bons matchups et qu’on reste connectés, on peut gagner. Mais il faudra être lucides, comme contre Fnatic ».
La Karmine Corp avance, lentement mais sûrement. La contre-performance en finale du First Stand a laissé des traces, mais il a aussi ouvert les yeux. À travers une progression patiente, un travail minutieux sur les drafts, la communication et la discipline, l’équipe de Reha semble avoir trouvé un second souffle. Face à Movistar KOI, c’est plus qu’un match : c’est un test de maturité, une validation de projet. Et peut-être, une première marche vers l’international.
- Lien pratique : le suivi complet du LEC Spring Split 2025