La mi-saison de la Pro League fut l'occasion pour la rédaction de questionner Bastien "BiBoo" Dulac, le capitaine de Vitality.

Il est le capitaine emblématique d'une équipe française depuis plusieurs années, groupe qui intégrait les rangs de Team Vitality il y a près de deux ans de cela. Alors que l'histoire de l'écurie à l'Abeille vient de prendre un nouveau tournant avec un passage ambitieusement affirmé à l'international, Bastien "BiBoo" Dulac a répondu à quelques questions de la rédaction sur le collectif jaune et noir et la scène française en particulier.

*aAa* : A l'inter-saison, tu as tourné une page de l'histoire de Vitality.R6 en recrutant l'espagnol Goga et l'allemand Hungry dans ton équipe. Peux-tu revenir sur ces deux recrutements ?
BiBoo : Les deux recrutements ont été annoncés en même temps, mais leur objet est différent. Pour le remplacement de Quaal, on l'avait mis sur un rôle de hard breacher pour en libérer BriD, meilleur en second support/flex. Ce ne fut pas son rôle de prédilection et il l'a très bien rempli, mais il nous fallait un vrai hard breacher, un joueur d'expérience, on voulait step-up et on a eu l'opportunité Goga, double champion du monde, multiple champion de Pro League, on n'a pas hésité. Pour Spark, c'était plus une question de style de jeu. C'est un bon soldat, quelqu'un qui va bien suivre les stratégies, là où Hungry apporte plus de shootcall et de folie. Les deux joueurs sont différents, on a tryout les deux, les deux collaient au poste, mais on a voulu apporter un renouveau, quelque chose en plus. On a tenté ce pari, l'équipe était favorable et ça a plutôt bien marché dans l'ensemble.

Il y avait donc un désir de renouveau, une volonté de créer une nouvelle ère Vitality ?
Pas forcément, l'opportunité Goga est arrivée au moment où nous nous séparions de Quaal. Ça a fait sens, même si on aurait quoiqu'il arrive fait un changement, et il y a aussi eu l'opportunité Hungry en même temps. Mais oui, il y avait forcément ce côté où on voulait se renouveler, on commençait à atteindre nos limites et on vise clairement le Top 1-2 EU avec Vitality. On veut être au top, donc il fallait step-up.


Crédit photo : Aubin Menestret

BriD, ton coéquipier depuis belle lurette, reste donc le seul joueur français chez Vitality à tes côtés. Comment votre relation a-t-elle évolué depuis le récent mercato ? Cela a-t-il renforcé vos relations in-game ?
Notre relation n'est pas plus importante qu'une autre, étant tous sur un même pied d'égalité et avec la présence hiérarchique de Lyloun et de notre manager Fabien. Mais c'est sûr que cela rapproche un peu, on part par exemple au Six Invitational ensemble, on peut parler en français quand nos teammates ne sont pas là, ça nous en effet un peu rapprochés. Après, on a toujours été très bons potes, très proches, dans tous les line-up qu'on a eu avant, il y avait un esprit familial et ça l'a peut-être renforcé sans que cela ne soit un changement radical.

L'équipe désormais passée à l'inter, ce côté familial que tu m'as évoqué est-il conservé ? L'état d'esprit est-il le même ?
Honnêtement, ça a changé, forcément. Personne ne parle dans sa langue natale, ce qui rajoute de la distance bien que la cohésion du groupe soit très bonne. On s'entend bien, il n'y a pas de prises de tête, pas d'égo, c'est un plaisir de jouer avec ces mecs-là. Avant, on était plus d'un côté chauvin, pote, famille. Là, on est potes, mais dans une ambiance de travail renforcée par la barrière de la langue, ce qui est je pense une bonne chose avec notamment le professionnalisme que cela apporte. Ce n'est pas déplaisant, mais différent.

Vous êtes passés à très peu de choses de la qualification pour le Six Invitational et tenez pour le moment la quatrième place du classement de la Rainbow Six Pro League EU, juste derrière G2. Ce renouveau se fait-il d'ores et déjà ressentir ?
En Pro League, on a eu un peu de mal, les lundis n'étaient pas faciles [rires]. On parvient finalement à performer la dernière journée en battant Chaos. Il nous faut maintenant poursuivre sur cette lancée pour la deuxième partie de la saison. Notre absence au Six Inv est quand même un peu décevante, on perd contre MnM, un outsider, mais étant ensemble seulement depuis une dizaine de jours. Notre objectif n'était quoiqu'il en soit pas cet Invitational, on a procédé à deux changements juste avant, on savait que ça allait être compliqué, ce n'était qu'un bonus. La Pro League est tout de même importante, je pense qu'on a montré de bonnes choses, même si nos lundis ont encore une fois été compliqués. On est troisièmes à la mi-saison, il faut continuer et aller dans le Top 2 désormais.

Tu parlais de vos déroutes les lundis. Quels sont vos axes d'améliorations pour le nouveau segment de PL ?
Au sujet de nos perfs du lundis, c'est très bizarre à dire. On a l'impression de ne pas avoir la même équipe d'un playday à l'autre et c'est frustrant. On est capables de gagner le mercredi, et le lundi, on ne joue pas du tout comme il faut. Mais oui, on a trouvé des axes comme modifier notre planning et la manière dont on aborde les matchs. Cela a donné les résultats de notre dernier match. On se focus un peu plus sur jouer en début de semaine, et davantage sur l'analyse et la stratégie avant les matchs. Il n'y avait pas vraiment de raison, en praccs cela se passait très bien, pourtant, on tombait les lundis. Le mercredi, je pense qu'il y avait aussi le sursaut d'orgueil après la déception du lundi. Il faudrait quand même que perdre les lundis ne devienne pas une de nos habitudes.

Vos derniers recrutements impliquent votre inéligibilité aux événements français. Qu'as-tu à dire sur votre départ de la scène locale ?
Je n'irais pas jusqu'à regretter notre départ, même si la présence française va peut-être un peu manquer dans la mesure où faire des finales devant le public français et être auprès de nos fans, c'est toujours cool. Après, on est des compétiteurs et l'objectif est de gagner des Pro League, le Six Invitational. Pour ce faire, on a fait le choix d'équipe de partir sur un groupe européen. Ce sont des sacrifices et des compromis à faire que je ne vois pas comme un abandon. Les G2 n'ont jamais fait d'événement national. A un moment, l'international passe avant le national.

Internationalisation des équipes francophones : vers un déclin ou un renouveau de la scène française ?
Ces internationalisations ne sont que des concours de circonstances. On se retrouve européens, mais de base, ce n'était pas un choix. On était à la base tous français et c'est le départ de sNKy qui a fait qu'on a dû amener Stigi dans l'équipe. Il y a ensuite eu les opportunités Goga et Hungry qui ont fait qu'on a changé, mais nous ne nous sommes pas dit que nous devions absolument devenir une équipe européenne. On était très bien comme francophones et qu'avec Stigi. Il y avait aussi le fait qu'être un étranger, pour Stigi, dans une équipe française, c'était compliqué. On tendait à chercher peut-être un deuxième joueur européen, mais pas forcément un troisième. Ce sont comme je l'ai dit des concours de circonstances qui font que, mais il y a des équipes françaises - comme BDS qui nous l'ont prouvé à ce Six Invitational - qui performent très bien, comme IziDream qui s'est qualifiée en Challenger League et Grizi Esport qui arrive fort. Il y a encore de bons espoirs et bons talents en France, je ne pense donc pas à un déclin de la scène française, c'est juste qu'au top niveau, il y a eu ces concours de circonstances. Cela va arriver de plus en plus, dans chaque pays, les line-ups se sont créées localement, puis à l'international comme au foot, au basket, dans tout sport.


Crédit photo : Team Vitality

Tu as pris part à deux Six Invitational avec RaFaLe chez Supremacy. Pour la titanesque quatrième édition du Major, il brille chez BDS. Quel effet cela te fait-il, étant toi dans les gradins lors de ses récentes prouesses ?
Je suis content et fier de lui. Ça a toujours été un excellent joueur. Il a eu de temps en temps des baisses de motivation et des problèmes personnels, ce qui est dommage parce qu'il a un vrai talent et il l'a encore prouvé récemment, pendant les qualifiers, la Pro League et ce Six. C'est cool pour lui, ses mates sont des gars qui se donnent à fond et qui ont un niveau de fou. Temps mieux pour eux, j'aurais préféré être sur scène à leur place, je ne vais pas mentir [rires]. Je n'ai pas pu y être, mais eux ont pu, ils ont mérité leur place, performé quand il le fallait. Top 4 monde, GG les gars !

Comment as-tu trouvé cette édition du Six Invitational par rapport à la précédente ?
Le fait d'avoir un loser's bracket ajoute un truc, mais en retire aussi un peu. Ce sont deux visions différentes. La phase de groupes était similaire, mais ce qui a beaucoup changé, c'est au niveau de la production et de la logistique, puisque le début du tournoi s'est déroulé au sein même de l'hotel des joueurs. Il y a eu un step-up là-dessus ainsi que sur la scène, parce que l'an dernier, les joueurs étaient quand un même un peu loin du public et enfermés. Là, ils sont beaucoup plus au coeur de l'arène. Il y a un petit step-up - pas énorme - comparé à celui des précédentes éditions. C'est quand même un grand pas en avant, le stade est gigantesque, la foule est en délire, c'est cool.

Je te remercie pour le temps accordé et te laisse le mot de la fin.
Merci à toi pour l'interview, merci à tous les fans et supporters qui nous encouragent tout au long de l'année malgré nos lundis difficiles [rires]. On espère se qualifier aux finales de la Pro League et revenir au meilleur niveau de la scène internationale.