Waulk'in history est une série d'articles où nous revenons sur l'histoire des licences qui ont marqué les jeux de combat. Nous commençons aujourd'hui avec le premier d'entre eux, qui bien qu'il ne soit pas le premier jeu de combat de l'histoire, est le premier de la licence la plus connue : Street Fighter.

Le début de la gloire

En 1987 les genres les plus populaires sur borne d'arcade sont surtout les beat-em up et les rail shooters. Quelques jeux de combat existent (alors appelés jeux d'arts martiaux), mais sont généralement peu populaires car moins intéressants que les genres dominants. Bien que certains jeux PvP existent alors, dans la plupart des jeux des joueurs jouant simultanément s'entraident plutôt que de s'affronter. Si un joueur veut se montrer meilleur qu'un autre, il le fait en battant son highscore. C'est dans ce contexte que sort Street Fighter, premier jeu de combat de Capcom. Le principe est simple, le joueur doit battre différents adversaires dans une série de un contre un. Pour gagner il faut remporter 2 rounds, c'est à dire vider à deux reprises la barre de vie de son opposant. Chaque round dure 30 secondes, et si à l'issue du temps imparti les deux combattants sont encore debout, c'est celui qui a le plus de vie qui remporte le round.


Artwork de Street Fighter

Dans le rare cas où une égalité survient alors que chaque joueur a déjà remporté un round, l'ordinateur remporte le match. Si ce sont deux joueurs humains, alors les deux ont perdu. Dans le mode solo, un joueur peut continuer là où il a perdu, à condition de diposer de crédits ou de remettre une pièce s'il joue sur borne d'arcade. Un second joueur peut rejoindre le combat à tout moment, interrompant alors le combat en cours. Le jeu fut produit et dirigé par Takashi Nishiyama (crédité sous le nom Piston Takashi) et planifié par Hiroshi Matsumoto (crédité sous le nom Finish Hiroshi). Les deux hommes quittent ensuite Capcom pour rejoindre le studio SNK où ils s'occuperont de la plupart des licences de jeux de combat du studio, notamment les Fatal Fury et Art of Fighting. Ils retourneront chez Capcom durant le développement de Street Fighter IV. La direction artistique fut confiée à Keiji Inafune qui quittera ensuite le projet Street Fighter pour se concentrer sur la licence Mega Man. Outre les bornes d'arcade, le jeu fut porté sur plusieurs micro-ordinateurs et autres consoles de salon : TurboGrafx-CD, Commodore 64, ZX Spectrum, Amstrad CPC, DOS, Amiga, et Atari ST.


Borne d'arcade Street Fighter version Deluxe

Niveau gameplay, le jeu pose déjà les bases qui feront le succès de la série. Doté d'un joystick permettant d'aller dans 8 directions différentes, le joueur dispose aussi de trois boutons de poing (léger, moyen, fort ou petit, moyen, gros) et de trois boutons de pied (même principe que pour le poing). Le coup donné change en fonction du bouton pressé, non seulement au niveau de l'animation mais aussi de la vitesse et de la puissance. Les coups donnés sont également différents en fonction de la position du stick, et possèdent différentes propriétés en fonction de la postion du joueur au moment où il les lance. La garde se fait en restant sur la position arrière, et peut être debout (efficace contre les coups haut et milieu) ou accroupi (efficace contre les coups milieu et bas). Sur la version arcade Deluxe, les six boutons sont remplacés par deux boutons sensitifs, et la puissance du coup dépend de l'intensité de la pression exercée sur le bouton.

Pour les consoles de salon ne disposant ni de six boutons, ni de boutons sensitifs, la puissance du coup dépend du temps passé à appuyer sur la touche. Il y a trois coups spéciaux dans le jeu, qui se lancent en pressant une combinaison de directions et un coup. Ces techniques sont : le Hadoken (quart de cercle avant + poing), le Tatsumaki Senpukyaku (quart de cercle arrière + pied) et le Shoryuken (avant, bas, bas-avant + poing). Street Fighter est le seul jeu de la licence où les noms de ces coups sont traduits pour les versions internationales. Le Hadoken devient la Fireball (Boule de Feu), le Tatsu est renommé Hurricane Kick (Coup de Pied Tornade) et le Shoryuken hérite de l'appellation Dragon Punch (Coup de Poing du Dragon). Parmi ces coups, le Shoryuken est le plus puissant. Initialement pensé comme un anti-air, il se révèle être la meilleur réponse du jeu à la plupart des actions des adversaires. Capcom fera un clin d'œil à cette surpuissance dès Street Fighter II, en ajoutant une balafre immense sur le torse de Sagat le boss final de Street Fighter, cicatrice causée par un Shoryuken de Ryu dans le lore du jeu. Contrairement aux jeux postérieurs, les commandes des coups ne sont pas indiquées ni dans un manuel, ni sur la borne, laissant aux joueurs le soin de les découvrir par eux-mêmes.


Le cast de Street Fighter au complet. Oui Ryu était roux. Les années 80, TMTC.

Dans le mode solo, le joueur doit affronter huit combattants originaires de quatre pays différents :

  • le Japon avec Retsu, un maître du Kempo et Geki un ninja ;
  • les États Unis avec Joe, un champion des arts martiaux underground et Mike, un boxeur ;
  • la Chine avec Lee, un maître des arts martiaux chinois et Gen, un vieil assassin ayant développé son propre style ;
  • l'Angleterre avec Birdie qui mélange boxe et lutte, ainsi qu'Eagle, un garde du corps professionnel, ancien adversaire de Sagat.

Le joueur choisit lui même ses destinations, faisant varier l'ordre des combats au gré de ses envies. Une fois ces huit combattants vaincus, une nouvelle destination apparait. Il s'agit de la Thaïlande où deux pratiquants émérites du Muay-Thaï attendent le joueur : Sagat et son meilleur élève Adon. Bien que seuls Ryu et Ken soient normalement jouables dans Street Fighter (même si depuis le temps, certains ont réussi à rendre les autres personnages jouables), la plupart des personnages de Street Fighter réapparaîtront en tant que personnages jouables dans les futurs titres de la licence.

Cette particularité fait que le jeu n'est pas équilibré, et la plupart des personnages sont plus forts que Ryu, la palme revenant à Sagat qui est aujourd'hui encore considéré comme l'un des boss finaux les plus durs à battre de l'histoire des jeux de combat. Ce déséquilibre peut s'expliquer par le fait que le jeu était pensé pour l'arcade et qu'il fallait donc inciter le joueur à remettre une pièce dans la machine. Sagat sera rééquilibré lorsqu'il deviendra jouable, dans les titres postérieurs à Street Fighter. Néanmoins, à deux joueurs, le jeu est parfaitement équilibré vu que Ken n'est qu'un clone de Ryu. Le lore du jeu le place même en dehors de l'histoire, car bien qu'il soit le partenaire d'entraînement de Ryu, il ne participe pas au tournoi, préférant combattre dans un autre tournoi aux États-Unis. Le jeu propose aussi deux mini-jeux bonus où il faut casser des tables ou des briques, pour améliorer son score.


Cette pose de victoire a hanté de nombreux joueurs

Bien qu'il n'ait pas l'aura de son successeur direct, Street Fighter fut un succès à son époque. Assez populaire dans les salles d'arcade, il fut même l'un des jeux les plus populaires pendant un temps selon le magazine britannique Coinslot d'août 1988. Les critiques lui réservèrent un bon accueil, estimant que le jeu donnait un second souffle aux jeux d'art martiaux. Sa courbe d'apprentissage était notamment louée par les joueurs, car maîtriser totalement le jeu n'était pas simple, à la différence d'autres titres qui, eux, nécessitaient juste de connaître un niveau pour le réussir.