Cette deuxième semaine sera consacrée à Forg1ven qui, malgré sa mise à pied par Schalke, a marqué l'actualité compétitive du moment. Maintenant que sa carrière ne tient plus qu'à un fil, il nous manque déjà.

Une saison compétitive de League of Legends est souvent tumultueuse. La route est bien longue, du début du segment de printemps à la consécration d’un champion du monde. Les fans de tous les horizons sont tenus en haleine, entre compétitions régionales et internationales, les saisons régulières et les playoffs, les tournois sérieux et ceux d’exhibition… Mais quel bilan reste-t-il année après année ? On ne retient que trop souvent, avec une certaine froideur, les vainqueurs, les statistiques et les records. Mais ce serait une erreur d’occulter la multitude de petites histoires qui façonnent également une saison compétitive. Pour leur rendre hommage, la rédaction a décidé de consacrer une série d’articles à ces joueurs et ces équipes qui ne resteront peut-être pas dans les annales mais qui auront aussi pleinement participé à développer la passion du jeu. Pour capturer cette dimension émotionnelle, moment par moment, par-delà les chiffres et les résultats, voici le tip’s de la semaine.

 

Au revoir ou Adieu pour Forg1ven ?

Dans l’anonymat total, cette semaine, la ligue européenne a peut-être perdu pour de bon l’une de ses figures historiques. Konstantinos Tzortziou, plus connu sous le nom de Forg1ven a en effet été déchu de sa place de titulaire au sein de Schalke, ce qui ne présage rien de bon pour un joueur qui aura 28 ans cette année. Ce vétéran de la scène, passé par de célèbres écuries européennes (Gambit, SK Gaming, Origen, H2K…), pourrait bien voir son grand retour se terminer de manière prématurée, bien loin des projecteurs. Si l’on se gardera de tirer un bilan prématuré sur sa possible fin de carrière, il a tout de même fait l’actualité et mérite bien son tip's de la semaine.


Après 6 défaites en autant de matchs, le retour de Forg1ven à la compétition a été plus compliqué que prévu...
Dot Esports

 

Un palmarès pas à la hauteur de sa renommée

Forg1ven possède une solide réputation, qui se base autant sur ses mécaniques de jeu que sur son habituelle grande confiance en lui. Si on ne peut douter du niveau réel qu’il a eu pendant ses plus belles années, on peut également concevoir que la perception de son niveau a pu être amplifiée par ses déclarations retentissantes dans les médias et sur les réseaux. Outre Rekkles, quel ADC européen restera dans les mémories ? Zven a changé de région, Perkz a encore changé de rôle. La communauté se souvient-elle de Genja ? On pourrait citer Puszu et Emperor parce qu’ils ont remporté un titre en Europe, mais tout le monde comprendra qu’on les écarte rapidement de la discussion. Pas besoin de beaucoup se mouiller pour faire de Forg1ven le second ADC ayant le plus marqué l’histoire de la ligue européenne.

S’il est impossible de nier l’impact et l’héritage laissés derrière lui par le joueur grec, son palmarès reste cependant extrêmement décevant. En plus de n’avoir jamais remporté de titre européen, il n’a même pas disputé de finale ! Si sa carrière s’arrête bel et bien là, il n’aura dans son armoire à trophées qu’un titre aux European Masters en 2018. À sa décharge on pourrait noter 4 participations aux playoffs européens à une époque où il y avait encore des montées et des descentes, et une participation aux Worlds de 2016 avec H2K où il a atteint les demi-finales. Mais est-ce que dans l’esport, l’important c’est vraiment de participer et pas de gagner ?

 

Des coups d’éclats en dehors de la faille

À une époque, Forg1ven était ultra dominateur en phase de lane et son Graves faisait trembler dans les chaumières. On se souvient notamment de sa première place en saison régulière gagnée en 2015 avec SK et leur brillant bilan de 15 victoires pour 3 défaites. C’est à cette occasion que le célèbre même « by far » est né au détour d’une question, a priori innocente sur l’analyse desk. Rentrée aujourd’hui dans la postérité, cette punchline restera sûrement le meilleur move de sa carrière de joueur.

C’est pour ce trop plein de confiance qu’on aime ou qu’on déteste ce joueur. Figure parfaite du joueur à l’ego surdimensionné, il incarne un personnage haut en couleur. Alors que ce type de personnalité est menacé par la professionnalisation progressive du secteur, l’harmonisation des profils, la montée des discours convenus et la cordialité affichée, c’est peut-être aussi à cause de cette personnalité détonante que Forg1ven est reconnu et restera comme un joueur à part. Capable du meilleur comme du pire, il faut cependant également souligner que son comportement lui a valu plusieurs sanctions.

Si une première amende de 1000 dollars marqua une première tâche au tableau en 2014, c’est en 2015 que sa toxicité lui coûta le plus cher. Alors que son équipe de l’époque, Gambit, se trouvait à la 5e place et en position de se qualifier aux playoffs, Forg1ven reçut 4 matchs de suspension à cause de son comportement, une semaine avant la fin de la saison régulière… Contrainte de jouer avec un remplaçant de fortune (Moopz, un main support), l’équipe termina finalement à une piteuse 8e place et vit ses chances de playoffs et de Worlds réduites à néant… Nul besoin d’expliquer que Gambit ne conserva pas Forg1ven la saison suivante… Il ne se pénalisa pas seulement lui, mais l’intégralité de ses coéquipiers et de sa structure. 

 

Une fin de carrière compromise ?

Après 2016, Forg1ven a un peu disparu des radars. Jouant dans des ligues de seconde zone, il a surtout dû faire son service militaire en Grèce. Après 4 ans sans jouer au plus haut niveau, c’est cette année qu’il faisait son grand retour en ligue première. Rejoignant une équipe en bonne forme qui avait manqué les Worlds de peu la saison dernière, il pouvait se montrer ambitieux… Même si de nombreux observateurs avaient considéré, avec raison, que son retour à la compétition après tant d’années, et sa cohabitation avec Gilius, un autre joueur à la réputation sulfureuse, pouvaient se révéler compliqués. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les craintes furent justifiées, puisqu’après 6 matchs, ponctuées par 6 défaites, Forg1ven fut mis sur la touche au bénéfice d’Innaxe, 0 match en LEC au compteur et surtout de 7 ans son cadet. Petit clin d’œil de l’histoire, Schalke joue désormais sans son vétéran grec mais aussi sans Gilius, qui fut le premier à sauter après la série de défaites de l’équipe allemande.

Être mis sur le banc n’a rien de dramatique, surtout que depuis l’intégration des équipes académiques, il est possible de retrouver une place de titulaire en cours de saison. Mais on voit mal Schalke miser trop de nouveau sur un joueur de 27 ans, d’autant plus que c’est avec le jeune rookie de 19 ans que l’équipe a obtenu sa première victoire de la saison, contre, excusez du peu, G2, les champions en titre. Innaxe n’est d’ailleurs pas n’importe qui, il était aux Worlds l’année dernière avec UOL et a failli créer l’exploit durant le Play-In.


À bientôt 28 ans, Forg1ven semble maintenant appartir au passé... Parmi l'ancienne équipe de SK Gaming, saurez-vous reconnaître tous les joueurs ? En plus du Grec, un seul joue encore au plus haut niveau.

C’est d’autant plus préoccupant que Forg1ven n’a pas montré l’image la plus positive suite à sa mise à l’écart. Il a de nouveau pris la parole sur les réseaux pour mettre en cause son équipe, dont il est encore officiellement membre. On le voit également mal jouer en équipe académique pour reprendre sa place de titulaire… Cela ne correspondant pas trop au personnage. Si Gilius a repris le chemin de l’équipe 2, Forg1ven a pour le moment passé son tour. Si jamais Innaxe continue à bien se débrouiller, possible que le vétéran ait grillé sa dernière cartouche. Difficile de lui mettre sur le dos les 6 défaites inaugurales de son équipe, mais au vu de son standing et des ressources qui lui étaient attribuées dans les parties, il est compliqué de lui pardonner ses prises de décision hasardeuses et ses erreurs de placement. Le temps peut se révéler cruel, mais espérons pour lui que les fans sauront se souvenir d’autre chose, pour le meilleur et pour le pire, que de ses 3 dernières semaines de compétition.