Ce phénomène correspond d\'ailleurs assez bien avec cette \"tribalisation\" de notre société où chaque personne doit pouvoir être mise dans une case étiquetée, où chacun appartient à une espèce de tribu (au sens probabiliste du terme), une classe, un groupe dont il véhicule certaines caractéristiques propres et que l\'on peut soit disant aisément reconnaître. En tout cas, ça c’est selon les personnes extérieures à ce groupe. Car dans les faits... Je ne vais pas vous parler de tolérance et de respect, vous êtes assez grands pour faire évoluer ces notions dans votre fort intérieur, savoir en toucher les limites voire les franchir quand non, vraiment, certains ne vont pas de pair avec notre société, comme nous ne pouvons nous accoutumer à la leur sans la transgresser – c’est un autre débat, ce n’est pas le sujet du blog, mais c’est un concept ayant son intérêt dans ce qui suit.

Car s’il y en a bien qui franchissent les démarcations, multiplient allègrement les amalgames et véhiculent des notions fausses dans un emballage malheureusement estampillé vérité, ce sont bien les médias. On nous parle de geeks, de nerds ou encore de nolifes. D\'ailleurs c\'est ce dernier terme qui semble avoir la côte niveau impact médiatique ces derniers temps, probablement à cause de la chaîne éponyme qui, en voulant jouer sur cette désignation, n’aura pour le coup pas vraiment donné un coup de main à ceux qui se font ainsi cataloguer.

Bref, les mecs derrière leur ordinateur ou leur console, appelez les comme vous le souhaitez, n\'échappent pas à la bonne vieille règle des \"préjugés à la con\", lesquels vont bon train les concernant. Attention, on s’accroche : moches, petits, rondouillards, à lunettes, boutonneux, à peau blanche/cadavérique, ne sachant pas s\'exprimer, etc. C\'est pourtant l\'histoire du statisticien qui ne prend évidemment pas 1,76 café par jour : ceux qui parmi les joueurs de jeux vidéo réunissent tous ces critères à la fois sont pratiquement impossibles à dénicher.


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Le joueur aujourd\'hui

Il suffit de se rendre en LAN pour s\'en rendre compte. Alors certes, il y a des joueurs un peu enrobés et à lunettes. Et puis même, parfois, ont-ils les cheveux mal coupés.  Faut-il pour autant en tirer une généralité, le \"témoignage exemplaire\" comme les chaînes nationales se complaisent à en proposer, lesquels finissent par régir bon gré mal gré l\'inconscient collectif, car c\'est \"Vu à la télé\", donc c\'est avéré ? Si vous avez eu l\'occasion de côtoyer des journalistes ou des rédacteurs en chef (je ne parle bien évidement pas du site aAa, où tout le monde est bénévole), le constat est clair : les premiers vous diront qu’ils ne sont pas comme leurs confrères, que eux ils savent bosser, oui madame. Quant aux seconds... ils vous confirmeront que les premiers sont des incompétents. Car oui, s’entourer ou interroger des professionnels quand on évoque un sujet quelconque pour s’adjuger un tantinet de crédit à ses propos ne permet pas de valider l’ensemble du reportage. Seuls les spécialistes, les vrais, ceux qui maîtrisent parfaitement leur sujet doivent et peuvent être crédibles. Malheureusement, ils sont bien rares sur les chaînes nationales, encore plus quand il s’agit de sujets précis comme ceux qui concernent le gaming. Je vous mets par conséquent au défi de trouver un sujet lors d\'un 20h de grandes chaînes où c’est un spécialiste des jeux vidéo qui a mené la chose de A à Z. Bon courage.

Parmi les journalistes, il y a ceux qui s\'arrêtent à une retranscription enjolivée de vos propos. Réjouissez-vous, vous êtes tombé sur un ‘pas trop mauvais’, un écrivain raté qui se console dans ses articles, ses envolées lyriques ne faisant pas trop de dégâts au sujet initial. Si en revanche vous vous apercevez qu\'il y a eu retranscription exacte de vos propos, attention, on n\'a très probablement rien compris au sujet traité, et pour éviter les écarts, on ne se hasarde pas dans une retouche des entrevues, mais l’on se permet d’en faire à côté. Vérifiez bien l’article, les morceaux d’interviews choisis et leur agencement, à la signification qu’ils pourraient prendre et surtout à ce que l’auteur à écrit entre les citations : vous pourriez avoir de sacrées surprises. Si vous avez eu affaire aux médias, vous saurez que je n’invente rien. N’hésitez pas à poster votre expérience en commentaire. Attention, on parle de médias tout de même, pas de torches-cul à la Closer/Public qui eux racontent sciemment des mensonges, qu’ils soient de connivence avec les stars qui veulent faire parler d’elle ou non (je suis notamment désolé de connaître quelqu’un dont le compagnon fait la nouvelle star, et qui découvre chaque semaine une petite amie différente acoquinée à son homme, pendant que le producteur de l’émission lui rappelle qu’il ne faut pas porter plainte).



Tout cela nous amène à cette question : pourquoi les médias – la télévision surtout – traitent-ils les joueurs de jeux vidéo ainsi ? Réfléchissez, pas trop longtemps, je viens en plus de vous donner un indice en précisant de quel média il s’agissait en particulier... La réponse est en effet très simple, plus évidente que la HD qui embarrasse les présentateurs télé car cette qualité d’image révèle leurs défauts physiques (et oui !). Et bien, voyons, que faites-vous quand vous jouez aux jeux-vidéo ? Vous ne regardez pas la télévision ! Pas de bras, pas de chocolat ; je joue aux jeux vidéo, je ne regarde pas la télévision. Pire même, car bien souvent la console de jeux étant branchée sur le téléviseur, j’empêche ceux qui potentiellement pourraient regarder la télé de pouvoir le faire. Fichtre, en voilà une bonne raison pour que la télévision déclare la guerre au gaming. Comment cela se manifeste-t-il ? Et bien, malgré l’image qui s’est en partie améliorée de ces derniers, grâce notamment aux consoles dites de casual gaming que sont la Wii & la DS (si les filles, les femmes et les vieux jouent, c’est déjà plus difficile d’en dire du mal) et surtout parce que le secteur brasse de fait de plus en plus d’argent, on constate assez régulièrement des reportages assez vindicatifs à l’encontre du microcosme vidéoludique constitué de gros joueurs, quand il n’y a pas de reportage du tout. On pourrait croire qu’il s’agit d’ignorance vis-à-vis de ce secteur, ou que le secteur est trop petit mais il s’agit bien de désintérêt volontaire. Quand on sait que le jeu vidéo dégage plus d’argent que le cinéma, on peut se demander pourquoi on a le droit à l’agenda de la semaine avec les meilleures entrées en salle dans le journal, mais jamais rien de comparable sur les jeux vidéo. Étrange. Je me rappellerai toujours un ami travaillant (pauvre de lui) pour Martin Bouygues euh TF1, et qui m’avait dit, \"texto\", que la chaîne ne parlerait jamais de jeux vidéo pour en dire du bien. Et je viens plus haut de vous en donner la principale raison.


En parlant de TF1, on garde tous en tête la GA 2009, où la psychologue Vanessa Lalo, après être restée une heure en compagnie de journalistes de TF1 où elle leur aura martelé que le jeu vidéo en tant que tel n’était pas une source d’addiction, n’a en définitive vu sa trombine au 20h de TF1 que pendant 10 secondes et de surcroît pour s’entendre dire que... \"dans certains cas, on pouvait parler d’addiction selon certains critères psychiatriques\". Aïe le mal est fait. Mais nous étions prévenus : Claire Chazal avait de toute façon planté le décor en clôturant le lancement du reportage lors du 20h par un énigmatique \"Alors, peut-on parler d’addiction aux jeux vidéo ?\". Le moins que l’on puisse dire, c’est que le duo de TF1 dépêché sur place savait déjà ce qu’il devait retranscrire, et ferait tout pour l’obtenir.

Par la suite, la psychologue avait ensuite donné l’une des meilleures interviews que le site Esportsfrance ait pu proposer, où elle expliquait comment ses propos avaient été manipulés. L’article en question n’est malheureusement plus disponible, mais il avait été relayé à droite à gauche sur la toile, notamment sur le site du nouvel Obs (voir article et l’extrait de TF1).

Quelques mois plus tard, en septembre 2009, rebelote. Toujours ESFR, par l’entremise de ce cher joueur aAa.cs qu’est Philippe Rodier (voir article), s’interroge sur un nouveau reportage donné par la chaîne privée savamment intitulé \"le jeu vidéo est-il une drogue ?\" (voir la vidéo). Le simple fait de poser la question ainsi effraie, et TF1 en a bien évidemment conscience. La suite du reportage tourne assez classiquement à la diabolisation du jeu vidéo, histoire que les mères inquiètes fassent la déduction que l’on attend d’elles : \"les jeux vidéo, c’est dangereux, c’est TF1 qui le dit, donc si c’est dangereux, mon gosse ne va plus y jouer d’une part, et regarder la télé d’autre part, de préférence TF1, car ils m’apportent la vérité\". Alléluia, le dieu média a encore frappé.


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Elle prêche la bonne parole ?

Je tiens à préciser que ce phénomène ne concerne pas que TF1, détrompez-vous. Vous pouvez retrouver pas mal de reportages consacrés tantôt aux nolifes, tantôt aux phénomènes d’addiction, dans la plupart des cas avec pour objectif intrinsèque de souiller les jeux vidéo et leurs pratiquants au sein de la WebTv du site GameAddict.org, à cette adresse. Il suffit d’aller consulter dans les VODs.


Cet exemple du traitement par les médias du jeu vidéo est assez révélateur et permet d’illustrer deux choses. La première, c’est que les journalistes font ce qu’ils veulent, comme ils l’entendent, et que si vous n’en êtes pas aware, vous risquez la désinformation. La seconde, c’est que parfois, inconsciemment, les journalistes font mal leur travail, et on obtient le même résultat (ce que j’évoquais avec leurs amalgames).



Par conséquent, lorsque vous lisez un journal, regardez la télé ou tout simplement consultez un site internet d’information, ne soyez pas un mouton, réfléchissez, remettez en cause ce que vous avez sous les yeux et rapidement, vous vous rendrez compte des absurdités malheureusement trop régulièrement énoncées. Finalement, ce que je vous demande, c’est être un spectateur actif, et non plus passif. Et c’est dans l’ère du temps (sans faire de pied à Zeitgeist) : lorsque l’on joue à un jeu vidéo, on est bien sûr actif derrière son écran. Et bien, de par leur médiocrité notamment mise en avant dans leur traitement des jeux vidéo, les médias ont finalement contribué à faire du spectateur anciennement passif et à peu près comblé, un spectateur qui se doit d’être actif, s’il ne veut pas être pris pour un mouton de panurge. Et si l’on regarde la télé pour être actif... autant jouer à un jeu vidéo ;-)