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A l'occasion de l'anniversaire prochain de Gaming Jobs, la rédaction se penche sur le marché de l'emploi et du bénévolat dans l'esport français avec Matthieu Leclère.
 

L'esport avance tout comme son bassin de pratiquants. Les postes à pourvoir et les candidats sont de plus en plus nombreux, les formations proposées par diverses écoles ne sont pas en reste et l'apparition de sites spécialisés dans la recherche d'emploi n'est que la suite logique de cette évolution.

 

En avril, le site de recrutement dédié au monde du jeu vidéo et de l'esport, Gaming Jobs, célèbrera son premier anniversaire. La rédaction a profité de l'occasion pour aller à la rencontre de l'un de ses fondateurs, Matthieu Leclère, et lui poser quelques questions.


 

Un lancement au printemps 2017

 

L’an passé, en avril, Gaming Jobs apparaissait dans le microcosme esportif français. Si tu devais présenter le site en quelques lignes à un auditoire novice, quels mots choisirais-tu ?

Je dirais que Gaming Jobs souhaite aider l'esport à se professionnaliser, à sa mesure, en relayant des offres RH afin d'intégrer le milieu. Nous allons ainsi au contact de structures pros, semi-pros et amateurs, et les accompagnons dans la diffusion de leurs offres de recrutement (emploi, stage, formation et bénévolat). Tout en sachant que nous évoluons dans l'univers du jeu vidéo, et pas uniquement de l'esport, ce qui nous permet de proposer une large gamme d'annonces.

 

Comment et quand as-tu eu l’idée de lancer ce projet ? Est-ce une initiative personnelle ?

À la mi 2016, alors que je venais de quitter un poste dans l'enseignement, et après avoir entendu un certain nombre de mes étudiants évoquer l'idée de vivre du jeu vidéo, je me suis dit qu'il semblait y avoir un manque en France au niveau du relais des offres inhérentes à ce domaine (plus particulièrement au niveau de l'esport). J'en ai alors discuté avec Jonas, un ami exerçant en tant que développeur web (et avec lequel j'avais déjà bossé à de nombreuses reprises au niveau pro) ; et un autre ami, David, qui lui est spécialisé en sécurité informatique. Puis nous avons posé les bases du projet, réalisé une étude de marché et enquêté auprès de nos futurs clients afin d'identifier leurs besoins et points d'insatisfaction quant à leurs process RH actuels. Une fois tout cela à plat, nous avons créé l'entreprise et lancé la phase de développement de la plateforme, chacun sur nos propres domaines de compétences. C'est donc loin d'être une initiative personnelle, bien au contraire. Sans mes deux compères et la synergie de nos compétences, Gaming Jobs n'aurait sans doute jamais vu le jour.

 

La phase de lancement s’est-elle déroulée comme tu l’imaginais ?

Oui et non. Disons que l'on a eu le droit à une (trop) grosse quantité « d'imprévus prévisibles ». Au soir du lancement, le 21 avril 2017, tout était censé être prêt, évidemment : campagnes de com, jeux concours, plateforme opérationnelle, quelques annonces déjà en ligne, etc. Dans la pratique, nous avons eu le droit à une panne de notre hébergeur moins de 2 heures avant le lancement ; plusieurs de nos jeux concours ont été modifiés quelques heures avant leur lancement effectif ; une partie des annonces que nous voulions voir apparaître pour le lancement n'avait pas été publiée par les recruteurs… Puis vient le lancement officiel. Accrochés aux RS et à Google Analytics, la pression tombe d'un seul coup lorsque l'on comprend qu'à cet instant, nos 6 mois de travail sont présentés à tous et que nous ne maîtrisons plus vraiment les choses. Les variables « public », « perceptions personnelles », « sentiments », « mauvaise humeur », « hype », et bien d'autres, entrent dans l'équation, et nous devons alors être passifs, écoutant les feedbacks, et tirant le positif et les axes d'amélioration. Certains retours (comme pour n'importe quel lancement, et au vue de la désinhibition des RS) nous ont fait souffrir, d'autres nous ont redonné le moral. C'est le lot de ce genre de projet, et nous sommes ravis de nos résultats un an plus tard, qui viennent répondre pour nous à une bonne partie de ces détracteurs ;-).

 

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De nombreux acteurs partagent des annonces de recrutement

 

L'heure d'un premier bilan

 

Le site fêtera donc sa première année d’existence en avril. Peux-tu nous dresser un bilan de ces douze mois d’activité ? 

Carrément (tout du moins pour les 11 premiers mois, qui sont les chiffres que j'ai à ma disposition aujourd'hui). Gaming Jobs c'est, à ce jour, 262 recruteurs actifs et 1532 comptes candidats créés ; 436 annonces (jeu vidéo et esport) postées (5% d'annonces de formation ; 38% d'annonces de bénévolat ; 25% d'annonces de stage ; 32% d'annonces d'emploi) et plus de 1500 candidatures reçues en direct sur la plateforme (je dis en direct, car les recruteurs peuvent rediriger vers leur propre page de recrutement s'ils le souhaitent, donnée que l'on ne peut alors quantifier). En matière de consultations à proprement parlé, nous avons comptabilisé plus de 225 000 visiteurs et 3 000 000 de pages affichées, en progression d'environ 5,7% par mois. Au-delà de cela, nous agrémentons assez régulièrement nos pages d'interviews pédagogiques (il doit y en avoir un peu plus de 50 aujourd'hui), pages qui ont pour vocation d'essayer de comprendre le parcours, les opportunités saisies et les compétences utiles d'un large panel d'acteurs du secteur JV et de l'esport.

 

Qu'est-ce qui différencie Gaming Jobs des autres concurrents ? 

Nous naviguons sur plusieurs terrains et en tant que tel, il est difficile de parler de la concurrence (nous abordons des offres dans le jeu vidéo ET dans l'esport, et nous proposons aussi des offres de bénévolat (hors joueurs, que nous ne souhaitons pas relayer)). Pour autant, je peux vous parler de nos points forts : nous avons une démarche proactive pour aller chercher de nouvelles annonces, et essayons de proposer de plus en plus de postes (actuellement 119 actives sur le site), qu'ils soient professionnels ou amateurs, afin que le plus grand nombre y trouve son compte. Ensuite, nous sommes extrêmement friands des retours utilisateurs, et mettons régulièrement en place des mises à jour, tant vis à vis de nos algorithmes que de nos fonctionnalités (la V2 du front devrait du reste sortir sous quelques semaines). Enfin, nous devrions à la mi-2018 nous ouvrir à l'international et aller chatouiller nos concurrents européens, et ce dans une dynamique de développement moyen terme.

 

Comment procèdes-tu pour attirer des entités comme Bandai Namco ou le groupe Partouche ?

C'est au travers d'une veille constante que l'on prend connaissance des offres postées par les dites structures, que nous contactons ensuite (par téléphone quand c'est possible, par email / RS à défaut). Nous leur présentons la plateforme, notre dynamique, nos chiffres, et les invitons à faire un essai pour se faire leur propre idée de notre pertinence. L'accueil est généralement bon, et les retours satisfaisants, même si nous savons qu'il nous reste des axes d'amélioration à mettre en œuvre (capter des profils davantage confirmés / senior en fait notamment partie). Dans tous les cas, nous sommes ravis que des structures comme Bandai Namco, le groupe Partouche, Meltdown Bar ou encore dernièrement Warner Bros et France Télévision, nous offrent et renouvellent leur confiance en tant que soutien à leur service RH au travers de notre sourcing candidats.

 

Quel est le profil « moyen » d’un visiteur du site ?

C'est un homme (surprise !), entre 21 et 25 ans, dont le niveau d'études supérieures est la Licence, et ayant majoritairement deux expériences professionnelles à son actif. Il recherche un stage ou un emploi, a une mobilité nationale, parle anglais et espagnol avec un niveau intermédiaire, et joue à League of Legends ou Overwatch. Bien qu'une grosse majorité de nos offres (d'emploi / stage surtout) soit basée en région parisienne, le visiteur type vient d'un peu partout en France. A 43%, c'est le Seo (référencement naturel) qui est notre source de trafic principal, puis les sites référents et les iFrame que nos partenaires utilisent (Stakrn, Atlangames, Pro-Gamer.fr, etc.), et enfin les réseaux sociaux. En moyenne, le visiteur type reste 3 minutes et 14 secondes sur le site, regarde 3,53 pages dont deux pages d'annonces. J'espère que cela répond à votre question o/.

 

annexxe_tuto2 Des tutos agrémentent le site aux côtés des diverses annonces

 

L'esport et ses problématiques

 

Le secteur de l'esport et du jeu vidéo n'est-il pas propice à un abus de demande de "bénévolat" et ainsi bénéficier d'une main-d’œuvre gratuite ? Quelle part représente-t-il par rapport au reste des demandes (CDD et CDI) ? 

Comme indiqué plus haut, il y a six points de différences statistiques entre le bénévolat et l'emploi au niveau de nos annonces. Cela s'explique notamment par le nombre important d'associations / de teams esportives qui s'inscrivent sur la plateforme, et recherchent du staff. Pour autant, il me semble davantage pertinent de regarder les valeurs absolues plutôt que relatives. Nous avons ainsi pu relayer environ 140 annonces d'emploi en 11 mois, soit 13 par mois, ce qui me semble être un chiffre plutôt intéressant, au-delà des offres que nous n'avons pu capter.

 

Pour autant, cela n'enlève en rien cet aspect «propositions du bénévolat ». J'en discute assez régulièrement, que ce soit avec d'autres acteurs du milieu, ou mes étudiants qui me font part de leurs inquiétudes à ce sujet. Mon avis est assez tranché : toute expérience est bonne à prendre. Personne ne vous oblige à faire du bénévolat pour une asso’, une plateforme web, une team. C'est un choix très personnel. Si effectivement vous le faites en vous disant « dans 3 mois, ils vont me proposer un poste rémunéré », alors c'est peut être que votre dynamique n'est pas la bonne (toujours d'après moi). Le milieu de l'esport se construit, il a besoin de contributeurs et de passionnés, prêts à donner de leur temps pour le faire (re)connaître, le vulgariser, le développer. En contrepartie de quoi, j'ose l'espérer tout du moins, ils auront l'occasion de gagner en compétences, d'étoffer leur CV, d'étendre leur réseau dans ce monde si petit. Et dans le meilleur des cas, on saisit une opportunité qui nous permet d'en vivre. Nous recevons, ponctuellement, des messages comme celui-ci qui nous laisse penser que la voie du bénévolat a son intérêt (j'ai rendu anonyme certaines informations) :

« De mon côté, j'ai aussi à vous remercier. J'étais l'un des premiers inscrits sur votre site, et j'y ai trouvé mon premier job dans l'esport, organisateur tournois (bénévole) chez X. Depuis, ça a fait boule de neige, et me voilà :) et l'aventure n'est pas finie ! »

 

Le manque de formation agréée et reconnue n'est-il pas un frein à la professionnalisation du secteur et au développement de Gaming Jobs ?

Je n'en suis pas sûr. Qu'elle soit un frein à la reconnaissance du milieu par certain(e)s parents / institutions, ou encore un frein à l'éthique avec des formations « sorties d'un chapeau », sans nul doute. Et les exemples sont encore trop nombreux à ce sujet. Mais étant issu du monde de la formation, je sais néanmoins que le processus pour faire reconnaître de « nouvelles » formations par l'état / le RNCP est long et fastidieux. Pour la majorité des organismes de formations, cela représente plusieurs années (3, en toute logique) à dispenser d'une formation, sans qu'elle n'ait forcément de reconnaissance, montrer « patte blanche », fournir des statistiques ténues quant aux taux d'insertion à l'emploi, avant qu'enfin le certificateur ne la reconnaisse et lui octroie un éventuel titre. De nombreux acteurs se sont positionnés sur cette démarche, légitime, à moyen terme, afin d'offrir au milieu des diplômes / certifications spécialisées dans l'esport. Donc pour ma part, je n'y vois pas vraiment un manque, mais plutôt une démarche globale lancée, et en passe de réussir !

 

annexe2_itw Gaming Jobs propose aussi de nombreuses interviews qui abordent notamment ces problématiques

 

Et la suite ?

 

Quels sont les projets à venir pour Gaming Jobs ces douze prochains mois ?

La sortie de la V2 de notre front page, d'ici quelques semaines. Suivie de près par la sortie de notre V2 backoffice recruteurs, afin de leur faire gagner encore davantage de temps dans la gestion de leur vivier candidats. Divers outils d'informations pour les candidats, afin qu'ils soient prévenus rapidement des offres pouvant les intéresser et venant de pop sur la plateforme. Nous continuons aussi de rechercher des partenaires, de toutes tailles, afin d'implémenter nos iFrames et créer ainsi du contenu frais et régulier sur leur propre site. Enfin, les deux derniers dossiers « chauds » sont l'ouverture à l'international, en milieu d'année, ainsi que la recherche de partenaires synergiques en matière de visibilité.

 

Un mot de la fin pour clôturer cette interview ?

Avec plaisir, car on a rarement l'occasion de le faire de manière « formelle » : un grand merci à l'écosystème esportif français ! Effectivement, une fois que nous avons pu faire « nos preuves » et lui montrer notre bonne volonté, nous avons été très bien accueillis par la majorité des acteurs, et du public. Nous avons de plus en plus de retours spontanés drainant des remerciements, ou des encouragements ; des bonnes volontés prêtes à nous donner un coup de main sur telle ou telle chose ; des propositions de partenariats pleines de dynamisme ; et une augmentation constante des internautes candidats utilisant nos services. Et franchement, chacun de ces points nous fait un bien fou, et nous donne encore plus l'envie de bien faire les choses, et d'aider, à notre niveau, ce merveilleux monde du jeu vidéo et de l'esport à prendre encore davantage de place dans notre quotidien à tous.

 

 

*Article sponsorisé