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Les Français à l'Overwatch League ne sont pas que joueurs ; la prestigieuse ligue compte également deux coachs français, dont Julien « daemoN » Ducros, une étoile montante d’Overwatch. Retour sur son envolée aux États-Unis, avec une interview réalisée par la rédaction le dimanche 21 janvier.

 

Retour sur son parcours

 

Du haut de ses 21 ans, le coach a gravi les échelons petit à petit sur la scène du FPS de Blizzard jusqu'à arriver à l'Overwatch League. Ayant commencé comme joueur, il est recruté en tant que coach des GamersOrigin fin 2016. Il atteint ensuite le niveau européen en rejoignant les Movistar Riders en avril 2017. Enfin, il revient à ses racines en devenant analyste des Rogue (qui ont représenté la France à la Coupe du Monde) et après une période à vide quand l’équipe se sépare, il finit par se faire une place dans le sésame de la scène esport d'Overwatch.

 

 

L’ancien analyste des Rogue recruté dans l'Overwatch League

 

*aAa* SaltySwan : Peux-tu te présenter ?

LA Valiant daemoN : Je m’appelle Julien Ducros, j’ai 21 ans et j’utilise le pseudonyme « daemoN ». Je suis coach et analyste esport sur le jeu Overwatch depuis un an. J’ai commencé au début octobre de l’année dernière.

 

Dans quelle situation professionnelle étais-tu quand tu as été contacté pour l’Overwatch League ?

J'avais quelques propositions, mais rien de très sûr. J’avais été démarché par moonL pour l'équipe Eagle Gaming, mais ça ne s'était pas fait. Dans la réalité, Los Angeles Valiant, c'était le sauvetage. À la Blizzcon en novembre, je m'étais rendu compte que je ne m'étais pas assez exposé donc je me concentrais sur ma chaîne YouTube et sur le subreddit fréquenté par la scène compétitive. J'avais aussi contacté presque toutes les équipes de l'OWL, mais soit je n'avais pas eu de réponse, soit des refus car les coachs avaient déjà été recrutés.

 

Concrètement, comment ça s’est passé ? 

À la Blizzcon, j’ai appris que SoOn et uNKOE voulaient travailler avec moi. Je ne m’y attendais pas car même si je les ai coachés, je n’étais pas très proche d’eux personnellement, je l’étais plus de Nico par exemple.

 

Finalement, c’est début décembre, à 4 heures du matin, que j’ai reçu un message d’uNKOE. Il m’a dit d’aller voir le head coach de Los Angeles Valiant, Cuddles. Deux jours après, je faisais une interview. Le soir-même, il m’a envoyé une VOD à travailler ; je l’ai renvoyée deux jours après puis une période d’essai m’a été proposée pour Los Angeles. Ma période d’essai se terminera le 31 et si je suis pris, j’aurai juste à refaire mon visa.

 

J’étais content d’être pris car j’avais un mauvais feeling… maintenant que c’est fait, je dois prouver que j’ai ma place à L.A. Après, comme me dit uNKOE, je ne suis jamais content, à part s’il y a quelque chose de vraiment ouf. Je suis toujours en recherche d’amélioration. Le seul moment où je pourrai vraiment sauter de joie, c’est si on gagne aux play-offs !

 

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 uNKOE, l'un des deux Français de la formation LA Valiant - (c) Blizzard

 

 

Une opportunité inattendue

 

Est-ce que tu étais déjà conscient de pouvoir entrer dans l’OWL en tant que coach ou c’était une idée que tu avais abandonnée à ce moment-là ?

Avant de recevoir le message de Cuddles, je pensais que c’était mort et que je n’avais plus possibilités. Je pensais aux Contenders Academy mais même là, rien n’était sûr. C’était une période où j’étais très dégoûté et j’étais déjà passé à un plan B pour la saison.

 

Quelle a été la réaction de tes parents quand tu leur as annoncé que tu partais pour les US ?

Ils étaient très contents, même s’ils étaient dans une situation compliquée et que ça voulait dire que je partirais. Financièrement, c’était un moment très difficile, surtout que c’était eux qui avaient besoin de moi plus que l’inverse. Mais j’ai beaucoup travaillé en tant que coach pour atteindre l’Overwatch League.  Quand l’annonce a été faite, je m’étais dit tout de suite que je ferais tout pour y arriver. Ils me soutenaient depuis que j’avais apporté de l’argent en allant chez GamersOrigin, puis Movistar Riders. Maintenant, j’ai un salaire et je peux envoyer de l’argent à mes parents.

 

Selon toi, qu’est-ce qui a fait que tu as été pris plutôt que quelqu’un d’autre ?

Je pense que c’est le fruit de mon travail. Je suis l’intermédiaire entre le staff et SoOn et uNKOE, je m’occupe surtout d’eux dans et hors du jeu. Je dois les « garder à niveau », mais ça c’est une blague : je trouve leurs petites erreurs pour les rendre plus forts. Je me concentre sur ça.

 

Du coup, je pense que j’ai été recruté car je suis le seul analyste français qui soit passé chez Rogue. Je n’avais pas de relations rapprochées avec les joueurs, donc je pense que c’est parce que j’ai fait du bon boulot chez eux. En France, on n’a pas de coach vraiment bon à part Kirby [ndlr : coach de Philadelphia Fusion] et du côté des objectifs, j’en avais rempli quelques uns. Je pense que s’il y avait eu plus de coachs français en concurrence, j’aurais pu ne pas être pris.

 

 

Le rêve américain

 

Quand tu es arrivé sur place, dans quel état d’esprit tu étais ?

Dès que je suis arrivé, je me suis dit que c’était là que tout commençait et que je devais tout défoncer. Le campus de Los Angeles Valiant est juste ouf, les appartements sont dingues, le support financier, physique et matériel est super… bref, c’est incroyable. C’est vraiment une seconde maison pour moi. Là, je suis dans le même appartement que le manager, Michael Schwartz, et Cuddles. Tout ira bien une fois que je me serai adapté à Los Angeles et au système américain.

 

De plus, Noah Winston [ndlr : directeur d’Immortals, la structure de LA Valiant] a des valeurs très professionnelles et portées sur l’entretien des joueurs donc je me suis mis dans ce mode de vie-là : faire du sport, etc. Tout ce que j’ai découvert chez Los Angeles Valiant, c’est quelque chose que je cherchais depuis que j’ai commencé à jouer. Même si GamersOrigin s’en rapprochait aussi, ce n’était pas une aussi grosse écurie qu’Immortals…

 

Comment s’est passée ton intégration au sein de la structure et de l’équipe ?

Ça s’est super bien passé, tout le monde est adorable. Ce sont des gens qui ne sont pas difficiles. Plus j’ai avancé dans l’équipe, plus ils ont été abordables, et c’est super car l’ambiance de travail pour un coach, c’est important. Quand les gens sont sympathiques et à l’écoute, ça le fait et ça donne plein de possibilités.

D’ailleurs, je n’avais pas eu de contacts avec les joueurs avant d’arriver sur place : je les ai rencontrés en arrivant sur le campus, comme pour Movistar Riders. Je pense que du côté américain et canadien, on s’apprécie bien. J’ai une énorme affinité avec les Sud-Coréens aussi. Ce sont des gens qui apprécient la connaissance du jeu donc on partage beaucoup de choses, même en dehors.

 

Tu as pu retrouver SoOn et uNKOE. Est-ce que ça n’a pas été difficile de vous intégrer au reste de l’équipe ?

Non, car les Coréens et les Français s’apprécient beaucoup. Je pense que c’est plus dur pour les remplaçants de s’intégrer par rapport à ceux qui jouent très souvent. Mais avec l’environnement, les remplaçants apportent beaucoup et il y a un échange même quand ils ne jouent pas. Tout le monde participe et on a le sentiment d’avoir une équipe à onze joueurs. Le travail nous réunit ; après, chacun a ses affinités avec les autres. Moi, je vais souvent dans la chambre de Benjamin [ndlr : uNKOE] et on chill.

 

Peux-tu me décrire une journée-type de match ?

Par exemple, contre Gladiators, on va se lever assez tard [ndlr : ils jouent le mercredi 24]. On mangera à midi, puis on partira au campus à 15h15. On fera des analyses jusqu’à 16h45 et on essaiera de faire un scrim [ndlr : entraînement contre une autre équipe] avant de jouer. D’ailleurs, pour les scrims, on ne cherche pas en-dehors de l’Overwatch League : les équipes s’entraînent entre elles.

 
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Un grand studio a été spécialement créé pour la compétition - (c) Robert Paul

 

 

Objectif top 1 pour Los Angeles Valiant

 

Quels sont vos objectifs pour LA Valiant ?

Tout va dépendre des futures décisions de l’équipe, mais on cherche forcément le top 1. Ce sera très difficile mais au long terme, plein de choses peuvent changer. On sait qu’on peut battre les Sud-Coréens, même s’ils nous font peur.

 

Parmi les 3 équipes coréennes, laquelle vous impressionne le plus ?

Les New-York Excelsior, je les vois s’améliorer sur le long terme. C’est une équipe de talents bruts. Seoul Dynasty, c’est le cerveau. Ils font un très bon travail stratégique et ce seront les plus rapides à s’adapter au format de l’Overwatch League, avec des maps qui changent chaque semaine, etc. London Spitfire, c’est une équipe explosive car ils ont 12 joueurs très compétents. Pour nous, c’est elle qui peut gagner l’Overwatch League donc on était très contents de faire un 2-3 contre eux. Mais si je devais mettre un veto sur une équipe, ça reste Seoul Dynasty.

 

Et toi personnellement, t’es-tu donné un défi particulier à relever ?

Pour moi, c’est atteindre le top 1. Je veux être un coach aussi bon qu’un Coréen. J’ai des idéologies en coaching assez similaires aux Coréens, ou en tout cas, j’essaie de m’en rapprocher le plus possible. Je veux aider Los Angeles Valiant à détruire la ligue, car ils ont le potentiel pour le faire !