Qui pourrait avoir le culot d'investir vingt millions de dollars dans une franchise pour un jeu vidéo qui n'a pas encore fait ses preuves dans le sport électronique ?

 

Dans ce deuxième opus, nous avons franchi l'Océan Pacifique et le désert du Mexique pour nous intéresser à l'acquéreur du slot de la ville de Houston, au Texas.

  

 

L'homme des réseaux : Chris Chaney

 

La structuration de l'acquisition de ce slot, un des derniers à avoir été attribué, semble particulièrement complexe. Blizzard aurait privilégié dans un premier temps un nom ayant davantage de cachet, à savoir la franchise NBA des Houston Rockets.  Cette dernière a nommé en décembre dernier un directeur e-sport, Sebastian Park, en charge de développer cette activité. Toutefois, les Rockets n'ont pas encore activé la deuxième étape de leur fusée e-sport puisqu'aucune annonce ne s'en est suivie.

 

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C'est en deuxième ressort qu'un cabinet de conseil en stratégie, fusions et acquisitions, Chaney Sports Group, est parvenu à négocier un accord entre un groupe d'investisseurs et la structure OpTic Gaming. Si Chris Chaney est un nouveau venu dans le monde du sport électronique, il a auparavant travaillé pour la NBA et connait bien les rouages du système de franchises sportives propre aux États-Unis. Le 24 août, lors d'une interview pour le blog de Nat Eliason, en évoquant ses projets qui n'étaient pas encore connus du grand public, il déclarait :

 

J'essaie également d'impliquer des propriétaires d'équipes sportives dans l'e-sport, c'est une tendance dans cette industrie, les propriétaires d'équipes de sports traditionnels investissent dans l'e-sport, qu'il s'agisse des équipes elles-mêmes ou de leurs propriétaires. [...] Notre groupe devrait réunir, je l'espère, trois groupes de propriétaires distincts qui possèdent chacun une ou deux équipes sportives différentes. Nous rassemblons trois groupes qui sont très bien établis et qui possèdent des équipes en MLS, MLB et NFL. Ce sont des propriétaires d'équipes sportives professionnelles.

 

 

Le magnat : Neil Leibman

 

Le principal investisseur à avoir mis la main à la patte est Neil Leibman, le Directeur Général de la société Summer Energy et copropriétaire de la franchise des Texas Rangers (basée à Dallas). Summer Energy est un petit distributeur d'électricité qui achète des mégawatts auprès de gros producteurs pour les revendre au détail. Sa fortune, Leibman l'a principalement constituée en 2005 en revendant sa société Gexa pour 60 millions de dollars (celle-ci exerçait la même activité que Summer Energy). Il l'a ensuite complétée de 2006 à 2013 en tant que PDG de la société Aspen Pipeline LP, un fonds de capital-risque spécialisé dans l'industrie des produits pétroliers et gaziers. Il a investi dans les Texas Rangers aux côtés d'une trentaine d'autres investisseurs en 2010 après la faillite des propriétaires précédents.

 

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Le gamer : Hector Rodriguez

 

OpTic Gaming est sans doute une des structures qui résume le mieux la renaissance de l'e-sport aux États-Unis après l'effondrement catastrophique de la Cyberathlete Professional League (CPL) en 2008. Après un lancement discret en 2006, le développement d'OpTic est intimement lié à celui de la Major League Gaming (MLG), l'équipe participe à ses tournois sur tous les opus de Call of Duty (de Modern Warfare 2 à Infinite Warfare) en grignotant quelques places chaque saison jusqu'à dominer la scène mondiale. En revanche, sur Counter-Strike: Global Offensive, elle a eu du mal à réaliser des résultats d'envergure en dehors de ses terres.

 

rodriguez

 

En accueillant ces nouveaux investissements, OpTic compte également faire l'acquisition d'une place en LCS. La précédente tentative d'achat du slot de Curse Academy en décembre 2014 s'était soldée par un échec. La structure a entamé des discussions avec Riot, cet investissement a un coût estimé à 13 millions de dollars. Historiquement installée dans la banlieue de Chicago, OpTic a entamé fin juillet son déménagement à Dallas, souvent considérée comme la Silicon Valley texane. 

   

La line-up : grande inconnue

  

Il y a un an déjà, Fnatic annonçait des négociations en cours entre les joueurs de WeUnited et OpTic Gaming. Toutefois, celles-ci ne se sont jamais concrétisées. Après les rumeurs de l'arrivée de FaZe ou de joueurs coréens qui se sont avérées sans fondements, la seule information confirmée par des proches des personnes concernées est l'arrivée de deux membres en provenance de FNRGFE et d'un analyste :

 

Flag Matt "coolmatt69" Iorio (Flex)

Flag Austin "Muma" Wilmot (Tank)

Flag Matt "Flame" Rodriguez (Analyste)

 

 

Verdict : popularité à convertir

 

Avec neuf franchises au total aux États-Unis, ce projet arrive très tard sur le marché des transferts et devra peut-être débourser pour faire venir des talents de l'étranger. La structure OpTic Gaming dispose d'une fanbase très développée aux États-Unis, surnommée le Green Wall, il existe un potentiel à convertir mais avec deux bémols. Premièrement, elle n'a jamais expérimenté sur Overwatch et a un grand déficit de notoriété à rattraper dans cette communauté. Deuxièmement, elle devra se doter d'une nouvelle marque selon les règles de Blizzard. Même si Hector Rodriguez espère que celle-ci inclura un clin d'oeil à OpTic, la renommée sera à rebâtir de zéro. Nulle doute que la rivalité de longue date avec EnvyUs (leurs confrontations sont appelées "eClassico" outre-Atlantique) aura droit à un battage médiatique sous la forme d'un derby texan, puisqu'EnvyUs est à Dallas.

 

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Décollage en vue pour la fusée OpTic gaming

 

Le rapprochement entre des acteurs de la vieille économie pétrolière du Texas et des joueurs pourrait également donner lieu à un clash des cultures. Les retombées économiques du projet seront à surveiller d'aussi près que les résultats sportifs. D'autant qu'il faudra convaincre les nouveaux actionnaires de mettre une deuxième fois la main à la poche en cas de construction d'un stade permettant d'accueillir des compétitions ultérieures, comme cela est souvent évoqué. Les stratèges de ce projet devront se montrer très persuasifs, alors que le retour sur investissement est pour le moins lointain et incertain.

 

L'avis de Chuck Norris*

 

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Leibman ? Rodriguez ? Pas très texan tout ça !

 

*enfin presque