scandale

Counter Strike n'est pas la seule scène eSportive à être touchée par des paris truqués et de l'obtention illégale d'argent : StarCraft II vient de poser le pied dans une piscine d'argent sale et de mises frauduleuses. De nombreux tournois auraient été touchés.

 

 

Olimoley met le feu aux poudres

 

Organisatrice de l'Olimoleague, Olivia Wong est une jeune femme ayant pris récemment de l'importance dans le macrocosme de la scène coréenne. Manager assistant et directrice du contenu chez Axiom, elle a lancé la seule compétition hebdomadaire sur le format des ZOTAC ou des Go4SC2 qui se tienne sur le serveur coréen. Professionnelle et très attachée à ce que les choses soient bien faites, elle a mené l'enquête sur un phénomène étonnant qui n'avait jusqu'alors pas été inquiété : le nombre de tournois dôtés avec de l'argent sorti de nulle part. Dragon Invitational, initiative louable de l'ancien joueur pro, prêt à sortir 8,000$ de sa poche pour animer la scène au cours de quatre éditions ? Pas si sûr.

 

Il y a de fortes suspicions de paris truqués sur la scène eSport depuis un certain temps, et StarCraft 2 n'échappe pas à la règle : avec un nombre significatif de petits tournois tels que le Dragon Invitational absolument non surveillés et non réglementés, il est très facile de passer inaperçu. Ces mises sont en effet réalisées en temps réel, c'est à dire pendant que les parties se jouent. Cependant, il faut tenir compte d'un détail : tous les streams ont toujours un certain délai afin d'éviter le streamhack de la part des joueurs. Il peut aller de 3 minutes à 10 minutes, et les paris ne sont clos qu'au début de la partie sur le stream. Que se passerait-il si quelqu'un était alors déjà dans la game ? Par exemple, un organisateur comme Dragon, qui n'est pas forcément directement en cause, ne gèrait pas réellement les personnes invitées dans les parties de son tournoi. Cela a ainsi découragé les éventuels streams communautaires qui n'étaient pas invités pour pouvoir caster et laissait la porte ouverte à de parfaits inconnus pour venir observer les games.

 

streamhack

Un délai de stream de 5 minutes correspond environ à 8 minutes StarCraft II. Le temps pour une partie qui ne va pas au late game d'être déjà largement orientée d'un côté ou de l'autre.

 

Ainsi, des parieurs coréens savent comment faire pour obtenir des informations pouvant radicalement changer la donne alors que les paris sont encore ouverts. Quand on voit que même lors de la BlizzCon ou dans les IEM Taipei, des joueurs arrivent à rentrer dans les parties pour spammer ensuite le chat malgré le contrôle des administrateurs, on se dit qu'il est vraiment aisé de se faire passer pour un streamer dans un petit tournoi géré par-dessus la jambe. Même les gros événements ne sont pas à l'abri, et il est possible que les administrateurs de l'ESL aient donc sans le vouloir permis des mises illégales, au même titre que Dragon ou Pughy, en laissant de faux casters entrer dans les games.

 

 

Le snowball du trucage

 

Mais les choses vont plus loin. Non content de s'arrêter là, ces parieurs sans scrupules profitent de l'absence de contrôle et de régulation des paris eSport pour profiter de l'effet boule de neige, en sponsorisant d'autres tournois pendant lesquels ils pourront se faire encore plus d'argent... Une situation qui durerait depuis six mois.

 

 

Dragon Invitational, PughCraft Invitational, Korean Super Tournament, Summer Series... Autant de petits tournois mettant en jeu exactement la même somme de 2,000$, venue d'un mystérieux donateur. En échange, le donateur demande l'accès aux parties aux organisateurs de la compétition : il y est donc soit en tant qu'administrateur, soit ledit administrateur partage les informations qu'il reçoit de la game en temps réel pour permettre des paris pertinents. Le pricepool est suffisamment négligeable pour certains joueurs professionnels pour qu'ils se permettent de tenter des cheeses ou des proxy, aboutissant à des parties très rapides, principale source de revenus des parieurs fous.

 

MAL, traducteur coréen pour les Red Bull BattleGrounds, a lancé depuis peu une série de tournois sponsorisés par un mystérieux donateur. Lors du stream de l'un de celui-ci, son cocaster, qui n'est autre que ToD, lui demande qui est le troisième observateur dans la partie, et MAL répond que c'est le sponsor qui souhaitait voir les parties. A retrouver ici. Il n'était probablement pas au courant de l'objectif frauduleux de son sponsor, mais le mal est fait. Blizzard n'a pas retenu la leçon de 2010, puisqu'ils ont été informés de cette situation sans réagir. 

 

 

Ce phénomène était resté loin de nos oreilles jusqu'à présent, puisqu'il ne concerne que la scène coréenne online. Olimoley a finalement décidé de mettre le feu aux poudres, et a été relayée par TotalBiscuit, manager principal d'Axiom, qui ne compte pas moins de 400.000 followers... Une certaine force de frappe donc. L'affaire a rapidement envahi Reddit et les réseaux sociaux, provoquant des réactions de toute part. Olimoley a envoyé des preuves à Richard Lewis, journaliste du Dailydot, qui les postera très bientôt dans un article très détaillé qui fera beaucoup de bruit. 

 

 

Des organisateurs qui n'osent pas réagir

 

De nombreux autres tournois sont remis en question, tels que la SC2Improve Winter Series qui se déroulent actuellement.

 

 

L'organisation SC2Improve est pour l'instant la seule à avoir répondu à ces allégations en publiant un communiqué officiel. Ils y annoncent qu'effectivement, le tournoi est sponsorisé par un mystérieux Coréen qui les a approchés en décembre, et au fur et à mesure que le scandale des paris truqués s'est mis à faire du bruit en Corée, SC2Improve a commencé à s'inquiéter sur l'origine des fonds des Winter Series : le sponsor demandait à observer les parties.

 

Les Winter Series se poursuivront finalement avec un cashprize réduit à 1,000$, qui sera fourni par l'organisateur lui-même, Jonathon 'Wardi' Ward. La SC2Improve Team League est quant à elle légitimement sponsorisée et se poursuivra comme prévu. L'explosion de cette affaire permettra probablement aux organisateurs de tournoi d'être plus attentifs quant aux mystérieux sponsors les approchant, et quant à l'importance des administrateurs des événements majeurs et locaux de contrôler l'accès au lobby. On ignore encore combien de milliers de dollars les mystérieux sponsors coréens ont empoché avec cette opération.